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Chronique Kipik Poker : Dr Feelgood and Mr Tilt

Chronique Kipik Poker : Dr Feelgood and Mr Tilt 0001

Comme je suis en manque de réussite flagrante depuis quelques temps, je préfère laisser de côté une semaine encore la Chronique prévue sur la Reshove Equity pour m'intéresser à des sujets qui me sont actuellement plus proches.

J'ai déjà dit plusieurs fois que notre cerveau, son fonctionnement, était le pire ennemi du joueur de poker (ou, si je ne l'ai pas écrit, au moins très fortement sous-entendu). La relation expérience/résultat est ancrée au plus profond de son schéma et, si elle a permis à l'espèce de survivre et d'évoluer, elle se révèle loin d'être parfaite quand il s'agit de gérer les notions de « long terme ».

Un exemple flagrant de ce « disfonctionnement » est le besoin de satisfaction, de se sentir bien. On vient de prendre une décision, qui se révèle positive, et le cerveau nous retourne une « congratulation » hormonale qui nous fait nous sentir bien. En général, c'est un système qui a fait ses preuves. Mais, pour le joueur de poker, c'est le début des erreurs…

Je gagne donc je fuis

Si vous jouez en Cash Game, vous avez probablement déjà ressenti ce symptôme qui est sans doute le défaut le plus courant chez les joueurs : on a tendance à jouer plus longtemps quand on est perdant. Et, inversement, à réduire la durée de ses sessions quand on affiche un joli bénéfice.

Cela peut sembler totalement illogique, puisqu'il semble évident que notre intérêt est de rester à une table où l'on gagne... plutôt qu'à une où les caves défilent. Mais c'est ainsi que notre cerveau fonctionne : le gain est perçu comme une sensation positive (succès), issue de décisions gagnantes (donc bonnes). Et notre cerveau est comme nous (étonnant, non ?), il adore ça : avoir « raison », se sentir bien.

Du coup, il va chercher à maintenir cet état de satisfaction. Quand on est gagnant, le moyen le plus rationnel d'y arriver est… de ne plus jouer. Jouer implique une prise de risque. Risque de perdre financièrement tout ou partie de nos gains mais, surtout, risque de perdre cette satisfaction émotionnelle qui nous est encore plus chère.

Tout joueur un peu expérimenté a déjà vécu ces sessions où on se pose gentiment à table pour enchaîner les premiums avec à chaque fois un adversaire qui se fait raser. Les statistiques étant ce qu'elles sont, cela va arriver à tout le monde, un moment ou un autre. A peine dix minutes de jeu et nous voilà avec un bénéfice irréaliste de 4 ou 5 caves.

Si vous jouez en live, je vous mets au défi de ne pas regarder la porte du casino avec insistance. Ou, si vous êtes chez vous, de continuer à jouer encore deux ou trois heures sans rien changer à votre style de jeu. Le fait est que la plupart des joueurs n'en est pas capable. Tout simplement parce que le cerveau n'est pas fait pour ça.

On aime tous, à commencer par notre cerveau, se sentir bien. Et les gagnants se sentent bien, pas les perdants. Les perdants se sentent misérables. Vouloir passer outre ce sentiment de bien-être et prendre le risque de perdre, et de perdre la sensation de satisfaction, demande un effort surhumain.

Je ne suis pas un loser !

A l'inverse, perdre génère un sentiment d'insatisfaction qui nous pousse à continuer. A insister tant que la satisfaction n'est pas atteinte.

L'exemple le plus flagrant est probablement ces sessions marathons qui nous arrivent parfois : on perd lourd en début de partie mais, plutôt que de s'arrêter là et courir le risque de tilter, il nous faut continuer. « La table est belle, j'ai juste manqué de chatte… » et on est encore là, cinq ou six heures plus tard, à ramasser petit pot sur petit pot pour nous refaire (en admettant qu'on ait pas tilté auparavant, évidemment, et qu'on ne se soit pas mis à gambler comme un fou pour vite remonter sans trop tenir compte de la justesse de nos décisions).

Le plus étonnant, dans ce scénario, c'est qu'on va le plus souvent s'arrêter tout de même avec quelques petites pertes. Mais avec une immense satisfaction. Notre cerveau va en fait réagir comme si on était gagnant : effacer les pertes revient à remplir un objectif; d'où satisfaction (et celle-ci ayant été longue et certainement riche en adrénaline, la satisfaction est amplifiée). Mais, pour autant, il va généralement se satisfaire d'un résultat légèrement négatif tant le risque de reperdre une partie de ces «gains» difficilement accumulés lui semble inacceptable. Dangereux pour notre/son bien-être. Le bilan des gains sera certes négatif, l'impact sur le taux horaire effroyable, et notre jeu peut-être très en-dessous de ses capacités, peu importe, la session sera une réussite. Et notre satisfaction pleine et entière.

Les neurones n'aiment pas sauter à l'élastique

Globalement, notre cerveau est allergique au risque. A l'incertitude. Ce n'est pas toujours le cas, notamment lors de l'adolescence (je rappelle que je ne suis pas un spécialiste de la neuropsychologie ou tout autre domaine voisin, si une « autorité » passe et remet ces idées en cause, ce sera un plaisir que d'en discuter). Mais, chez la majorité des gens, pour l'essentiel de leur vie, cela fonctionnera ainsi : notre cerveau (et, donc, nous) n'aime pas le risque, le doute. Il « aime » que tout se passe bien, les plans bien huilés, les décisions heureuses et les résultats positifs.

En même temps, le risque déclenche dans notre « machine cérébrale » de telles réactions hormonales que cette mise en danger est aussi jouissive. Et source d'addiction.

Autant dire que, si vous jouez au poker, votre cerveau est à la fête…

Stop Loss, Stop Win ?

De nombreux joueurs s'imposent des seuils de pertes/gains au-delà desquels ils décident de ne plus jouer. Je serais bien incapable de dire s'il s'agit d'une bonne chose. Ou pas. Pour ce que j'en ai vu chez différents joueurs, les résultats sont totalement variables. Je pense sincèrement qu'il n'y a pas de règle vraiment établie en la matière. Mais que c'est plus à chacun, selon sa réaction personnelle au risque, sa tendance à tilter, de trouver ses propres règles.

Ma seule conviction est que le Stop Win (s'arrêter au-delà d'un certain seuil de gains) n'a pas grand intérêt. Notre cerveau pratique naturellement un Stop Win très efficace. En tout cas pour la grande majorité des joueurs. Si, par contre, vous êtes dans le cas assez rare des joueurs qui passent en mode fou furieux dès qu'ils ont gagné une ou deux caves…

Je ne le dirai jamais assez : bien vous connaître, et connaître vos défauts, vos mauvaises tendances « naturelles » est une qualité irremplaçable. Et pas qu'au poker…

On ne parle pas «tournoi» cette semaine ?

Il est facile de constater combien notre cerveau réagit "irrationnellement" à la victoire en cash game. Ça l'est un peu moins en tournoi mais il ne faut pas se leurrer, ces processus sont ancrés si profondément en nous qu'ils se manifestent également.

Ça ne sera pas un secret pour les joueurs les plus expérimentés mais c'est certainement le premier point par lequel commencer : un joueur qui vient de gagner un gros pot en tournoi n'aura aucune envie de risquer de perdre ses jetons rapidement.

Si vous avez suivi la Table Finale des WSOP, pensez simplement au J2 d'Antoine Saout. La main en elle-même ne vaut rien. La position/situation est certes correcte pour un vol mais, avec un joueur comme Moon dans les blinds, c'est souvent un spot qu'on préfèrera éviter avec une main aussi bancale. La dynamique est pourtant parfaite avec Akenhead de BB qui vient de tripler son tapis sur un coup très chanceux. La suite est anecdotique (enfin, en terme de théorie du jeu) mais excellente exploitation de la dynamique par le français.

Un joueur qui vient de gagner un énorme pot est une cible idéale pour voler les blindes. Et plus encore si ce joueur a bénéficié d'un hasard très favorable. Il n'a plus aucune envie de jouer, son cerveau est saturé de satisfaction et son vœu le plus cher est que le tournoi s'arrête là.

Autre exploitation de cette « satisfaction démesurée » (puisque le gain de ce pot, aussi gros soit-il, est en réalité anecdotique) : si ce même joueur qui vient de chatter relance la main suivante, faites-vous plaisir et surelancez-le sans même regarder vos cartes. Vous n'aurez quasiment jamais plus de fold equity que dans ce genre de situation. Rien ne lui fait plus peur que de reperdre les jetons qu'il vient de gagner. Aussi irrationnelle que soit cette peur (mais quelle peur ne l'est pas ?), elle va l'amener à préférer se reposer sur son précieux acquis… même si celui-ci ne représente qu'une fraction infime des jetons qu'il faudra finalement gagner (et, conséquence logique, s'il ne baisse pas les bras, autant dire qu'il a un monstre en main).

Evidemment, cette réaction ne sera pas systématique. Certains joueurs vont au contraire sombrer dans l'ivresse de la satisfaction, ou se mettre en tête que ce coup de chatte les fait jouer en freeroll (ils auraient dû sauter, tout le reste est pour eux du bonus), et n'auront dès lors plus aucune retenue. Cela arrive, plus rarement, mais un tyran sommeille en chacun de nous et passer d'un tapis qui subit le jeu depuis une éternité à un tapis dominant suffit parfois à changer radicalement un joueur.

A l'inverse, je vous invite aussi à observer très attentivement le comportement d'un joueur qui disposait d'un gros tapis avant de perdre un pot important. Et à éviter ces joueurs, et surtout sa blinde, comme la peste. Même s'il dispose encore d'un tapis décent, et même d'un gros tapis!, il va généralement sur-réagir à la perte subie. Par contre, si vous trouvez une grosse main, n'hésitez pas à la sur-jouer contre lui. Inutile de jouer finement si sa seule pensée, obsessionnelle, est de se refaire de ses pertes. Traitez-le au contraire comme un joueur en tilt.

Dans les deux cas, ce n'est même pas le montant des gains/pertes qui sera le plus important. Mais plus la chance/malchance qui explique l'issue de la main. Un énorme tapis qui perd seulement 10% de ses jetons sur une runner runner quinte est plus susceptible de partir en vrille que s'il avait perdu la moitié de ses jetons avec TT contre QQ (contre un joueur faible, c'est aussi vrai s'il jouait à tapis préflop). Un joueur shortstack qui s'est laissé mourir et se retrouve tout à coup avec 12 blindes (bb) sur un chattage d'anthologie sera plus enclin à se coucher la main suivante sur une surelance que celui qui vient de passer de 9 à 21bb avec KK contre QQ.

En attendant de mettre votre cerveau à l'épreuve…

J'essaie de décortiquer autant que possible les mathématiques derrière le poker. Mais n'oubliez jamais qu'il s'agit aussi d'un jeu entre humains. Avec des réactions parfois absurdes. Et dépendantes, toujours, de la façon dont le cerveau traite l'information. Celui-ci étant imparfait, en particulier devant la gestion du risque et du hasard, savoir exploiter ces failles est aussi important que savoir exploiter les erreurs stratégiques de nos adversaires.

Et vous pourrez peut-être même en profiter pour réfléchir à la façon dont vous réagissez vous-mêmes face à ces situations de gains/pertes. Et à comment vos adversaires vous exploitent…

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