Entretien avec Isabelle « No Mercy » Mercier
Au poker, les femmes ont déjà prouvés depuis longtemps qu'elles peuvent se mesurer aux hommes, mais dans cet univers encore majoritairement masculin, peu d'entre elles sont vraiment reconnues sur la scène internationale.
Une jeune femme séduisante et charismatique a su se faire remarquer par son talent et des résultats déjà impressionnants. Beaucoup de gens connaissent Isabelle Mercier depuis qu'elle a gagné le « Ladies Night Out II » du World Poker Tour l'année dernière à Los Angeles.
Malgré un emploi du temps très chargé, c'est avec beaucoup de gentillesse qu'elle accepta de répondre à nos questions.
-Où est-tu actuellement ?
Ma « maison » en ce moment est l'Hôtel Casino le Rio à Las Vegas, où je reste six semaines pour participer aux tournois des WSOP. Je suis fière d'être l'ambassadrice itinérante de PokerStars.com et d'avoir l'opportunité de participer à tant de tournois internationaux de poker.
-Comment te sens-tu pendant ces World Series of Poker ?
Je vais faire de mon mieux pour me saisir d'un bracelet, mais je dois admettre que le nombre de joueurs est énorme et que c'est un vrai défi. J'ai quatre jours pendant lesquels je me repose actuellement avant mon prochain tournoi, je vais donc utiliser ce temps pour étudier mon jeu et y travailler. Jusqu'à présent j'ai été dans les places payés dans deux tournois, mais le plus important c'est que, arriver de plus en plus loin dans ces tournois me donne l'occasion de jouer avec de GRANDS joueurs de poker. Cela m'oblige à repousser mes limites, et faire encore mieux dans les tournois suivants.
-A l'occasion de ces grands tournois internationaux tu dois parfois rester de longues heures à une table de poker, parfois plusieurs jours, que fais-tu pour te détendre, as-tu une préparation particulière ?
Cela me prend un certain temps pour être prête pour un tournoi, je dirais environ deux heures. Je me réveille, sort de mon lit, boit un jus de fruit, un café, prend un bain avec des bougies allumés (oui, je fais ça le matin), me coiffe, me maquille et m'habille, ensuite je jette un coup d'il à mes e-mails. Je descend ensuite au Starbucks et fais le trajet entre ma chambre et la salle de poker qui est à l'extrémité opposée, au centre de convention du Rio, deux heures se sont évaporés. J'écoute de la musique sur mon baladeur en route pour le tournoi, je trouve que cela stimule ma préparation au jeu. Cela consomme beaucoup d'énergie de s'asseoir dans un tournoi et de lutter pendant des heures pour se frayer un chemin vers la victoire. La nuit, je trouve constructif de parler de mon jeu de la journée avec d'autres joueurs de poker, de discuter des coups, de stratégies, et de tant d'autres choses que vous devez analyser au poker. Je pense que c'est une part importante de l'apprentissage.
-Alors que professionnellement tous allez pour le mieux comment en es-tu arrivé à te dire que c'était le moment de tous quitter et de te consacrer uniquement au poker ?
J'avais un travail fantastique en tant que directrice de la salle de poker de l'ACF à Paris, mais après cinq ans, il était temps de passer à l'étape suivante, qui était de jouer professionnellement au poker. Dés que le poker explosa à la télé et qu'il devint possible d'être sponsorisé pour jouer au poker, cela fut naturel pour moi. J'ai joué au poker toute ma vie et le jeu a toujours été ma passion. Alors, j'ai donné ma démission de mon poste à l'ACF et j'ai organisé un week-end porte ouverte chez moi, pendant lequel j'ai vendu tout ce que je possédais. Depuis ce jour, je vis dans ma valise, voyageant à travers le monde. Il n'y a pas eu une personne qui ne m'ait dit que j'étais une idiote finie en décidant de vivre ma nouvelle vie au poker avec $10 000 sur moi. Sympa ! Enfin, je dirai que j'ai une grande confiance en moi et dans mes rêves. Avec raison. Ce n'était pas la première fois que je faisais un changement aussi radical dans ma vie. Déjà, dans ma vie d'avant - d'avant, j'était avocate pour le plus grand gestionnaire de portefeuille d'Amérique du nord. Je débutais une carrière fantastique et j'avais un grand bureau dans le centre de Montréal. Mais mon Dieu, ce que je voulais vraiment c'était voyager à travers le monde, et la compagnie ne m'aurai donné que 2-3 semaines de vacances par an. Encore à l'époque, je ne possédais pas grand chose, j'ai donc vendu ma voiture, payé mes dettes, et je suis partie pour Paris avec environ $50 dans la poche. C'est quand je regarde derrière moi que je réalise ce que je suis devenue et combien j'ai appris.
-Je cite Barbara Enright : « les femmes peuvent avoir un avantage sur leurs concurrents masculin, les psychologues appellent ça leur sixième sens, et cette instinct peut être un avantage de taille à une table de poker » penses-tu vraiment qu'être une femme soit un avantage à une table de poker ?
J'aurai tendance à être d'accord avec cette citation de Barbara, et je pense vraiment qu'un instinct très développé apparaît être une des principales qualité féminine. Non seulement ça, mais une grande qualité pour une joueuse de poker. Après connaître les maths, lire les gens est une part considérable du jeu, et connaître les maths est à la portée de quiconque y travaille. Lire ses adversaires est un talent bien plus difficile à développer, et cela fait une énorme différence quand vous possédez cette arme dans votre façon de jouer. Il semblerait que d'une manière générale les femmes possèdent une délicatesse des sentiments à l'égard d'autrui, et de plus elles ont une plus grande habileté à lire les autres joueurs à la table. Aussi longtemps qu'elles ne laissent pas les hommes les intimider !
-Tu as déjà participé à de nombreux événements télévisés, récemment au British Open de poker à la télévision anglaise, quel genre d'expérience était-ce de jouer en direct devant des caméras ?
Jouer "en direct" fut une expérience formidable, j'ai vraiment aimé ça et le referai n'importe quand ! D'abord j'adore jouer à la télé devant l'objectif des cameras, en fait c'est le meilleur côté de mon boulot. Les tables qui sont filmées ont une énergie incroyable que dégagent tous les joueurs de la table, et c'est très excitant ! Deuxièmement, savoir que les caméras sont en train de filmer vos cartes et un stimulant surprenant. Vous pouvez vous retrouver en train de faire des choses dont vous ne vous saviez pas capable ! Et troisièmement, jouer en direct a été beaucoup plus intéressant que toutes les autres parties télévisées que j'ai faite, tout simplement parce que cette fois-ci, le spectateur est capable de voir chaque carte qui t'est donnée et comment tu décides de jouer un coup, ou non. Grâce à cela je pense que ces parties télévisées en direct contribueront à élever le niveau du jeu.
-Il y a des coups que l'on n'oublie pas, quelle la victoire dont tu es la plus fière et pourquoi ? Le pire bad beat ?
La victoire qui m'est la plus chère est celle du World Poker Tour Ladies Night Out II, en Septembre dernier à Los Angeles. C'est mon premier titre majeur, et c'est le premier tournoi dans lequel j'ai été siiiiiii agressive, que le commentateur légendaire Mike Sexton m'a surnommé instantanément Isabelle « No Mercy »Mercier (Sans Pitié). Au delà de çà, c'est la performance qui a vraiment débuté ma vie de joueuse de tournoi et représentante de PokerStars.com.
En ce qui concerne mon pire bad beat, c'est le premier qui me reste le plus présent à l'esprit. Super! C'était pendant les WSOP 2004 et je jouais un satellite d'une table pour le gros tournoi. Je n'avais pas mon inscription encore, et c'était la nuit précédente le tournoi. J'ai joué mon meilleur jeu comme jamais et me retrouve en tête à tête contre un autre type. Je luttais pour ma vie, et finalement je touchais un brelan de quatre avec ma paire de quatre en main. Le flop était R64, et mon adversaire avait AR en main. Nos tapis étaient à peu prés équivalents, et tout l'argent fut misé au flop. Oui ! J'étais si contente de jouer dans le Championnat des WSOP !!!!..... Jusqu'à ce que la carte suivant soit un 6, et la dernière un autre 6 fatidique. Cela m'a tellement bouleversé à l'époque, en partie parce que c'était mon premier bad beat en tournoi, et en partie parce que j'étais encore assez inexpérimentée. J'ai été déprimé pendant une semaine entière, me gâchant la vie et celle de ceux autour de moi. Au delà de ça ce fut une bonne leçon, et aujourd'hui je reste joyeuse si je saute d'un tournoi sur un bad beat. Aussi longtemps que je joue bien, le reste ne dépendant pas de moi, je ne veux pas me rendre malade pour une chose sur laquelle je n'ai aucun contrôle.
-Quels joueurs crains-tu le plus à une table de poker ?
Je crois qu'il ne faut craindre personne si l'on veut réussir à ce jeu. La seule personne que vous devez craindre c'est vous-même, et dans ce sens il est vrai de dire que c'est soi-même et ses propres peurs qui sont vos pires ennemis au poker. Cependant, je dois admettre que parfois vous êtes face à un joueur qui semble jouer parfaitement et très durement chaque coup ! Il devient alors difficile de vous défendre, il crée une pression constante, et il est clairement le chef de la table. Ces situations sont très inconfortables, et le souvenir que vous gardez d'un tel joueur et une peur que vous ressentirez la prochaine fois que vous l'affronterez. C'est exactement ce qui s'est passé au WPT à $25 000 au Bellagio en Avril dernier avec David « le Dragon » Pham. La semaine dernière quand il est arrivé et s'est assis directement à ma droite dans un tournoi des WSOP, je me suis senti maaal. Mais bon, le poker est un jeu où il faut relever beaucoup de défis, c'est pourquoi c'est si marrant et difficile. Heureusement pour moi, j'ai réussi à surmonter ma peur, et j'ai joué mon meilleur jeu contre Pham au tournoi des WSOP.
-La vie de joueuse de poker professionnelle ne doit pas être de tout repos, quels en sont les inconvénients et les avantages ?
Personnellement, je ne vois que les bons côtés de jouer au poker professionnellement sur le circuit international. Je suis COMPLETEMENT libre de faire ce que je veux, quand je le veux, où je le veux. Je voyage à travers le monde et ne possède rien comme un appartement, une voiture, des factures, etc. Je me sens libre. Je n'ai pas de montre, je me couche quand je suis fatiguée, me lève quand je me réveille, je mange quand j'ai faim, j'appelle le room service si je paresse, appuie sur le bouton de la lingerie si j'ai du linge a envoyer nettoyer, tous les jours quelqu'un vient changer les draps et les serviettes, nettoyer la salle de bain, etc. En fin de compte, cela me convient très bien. Je ne voix pas de mauvais côtés à jouer au poker professionnellement. Mais chacun est différent, et je suis sûr que cette vie itinérante et incertaine ne conviendrait pas du tout à beaucoup de gens !
-Quels sont tes projets pour les prochain mois?
Ces temps-ci, j'ai travaillé dur sur mon nouveau site www.isabellemercier.com qui devrait être en fonction dans les jours qui viennent. Dés que c'est en place, je pense que je vais prendre un peu de temps pour moi ! Je vais faire une croisière trans-atlantique qui me ramènera en Europe après les WSOP pour jouer le WPT à Paris, et ce sera mon dernier tournoi avant cet automne. Je prend un mois de vacances en Août, et la première partie du mois je fais une croisière aux Caraïbes avec mes meilleurs amies. On se connaît depuis 20 ans, et nous aurons toutes 30 ans cet été. Cette croisière est notre célébration et j'ai l'impression d'être dans un film, cela ne peut pas arriver pour de vrai !!!Woohoo ! Après ça, j'irai au Québec quelques temps, et retournerai à Los Angeles à la fin du mois d'Août pour défendre mon titre au WPT Ladies Championship.
-Tu fais principalement des tournois mais qu'en est-il des cash games ? Joues-tu beaucoup sur Internet ?
Je suis vraiment une joueuse de tournoi plus que de parties d'argent. J'aime l'action et l'agressivité qu'il y a dans les tournois, contrairement aux parties d'argent, où il faut être plus patiente et disciplinée. J'aime la compétition, les tournois conviennent donc tout à fait à mon jeu. Les jetons n'ont aucune valeur, tout le monde a le même nombre de jetons, il y a un début et une fin, et un gagnant ! Mais les tournois sont très stimulants, c'est très compétitif, et il est nécessaire d'avoir des heures, des jours, des semaines et même des années d'expérience pour devenir vraiment bon. C'est pourquoi j'essaye de jouer le plus souvent possible, idéalement un tournoi par jour. Quand ce n'est pas en vrai, j'aime m'entraîner sur PokerStars.com. C'est mon site de poker en ligne, et PokerStars.com est le site numéro un pour les tournois sur Internet. J'aime le fait de pouvoir me connecter à n'importe quelle heure et de démarrer un tournoi dans les 15 minutes qui compte des milliers de participants ! C'est incroyablement appréciable !
Note : Si vous souhaitez vous mesurer à Isabelle sur PokerStars.com son surnom est Mercedez.