Thomas Kremser : "Berlin, mon cauchemar"
Thomas Kremser est spécialiste dans l'organisation de tournois de poker de haut niveau. Cet Autrichien âgé de 44 ans officie depuis seize ans dans le poker et aura débuté sa carrière au casino Concord Card de Vienne en organisant le premier tournoi international d'Europe en 1994.
Directeur des tournois de l'European Poker Tour, mais aussi des Spanish Poker Tour et Unibet Open, Thomas Kremser dirige une société de consulting en tournoi de poker live, online et TV : TK Poker Events. Entretien.
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Pokernews : “A quoi sert un directeur de tournoi au poker ?”
Thomas Kremser : “Le rôle d’un directeur de tournoi est d’apporter une certaine expérience, une garantie d’intégrité et une connaissance des règles du poker. Sa réputation est primordiale sur un tournoi. Ensuite, le directeur peut être chargé de la logistique de la compétition. Notamment, le processus d'inscription des joueurs au tournoi doit fonctionner parfaitement, c’est la porte d’entrée du tournoi. Les tables, les jetons, les cartes mais aussi l’horloge du tournoi et les croupiers doivent être en place correctement et à l'avance. Le jeu lui même est une part importante de son travail. Tout ce qui se déroule aux tables doit être maîtrisé. Le directeur doit donc avoir une compréhension profonde des règles du jeu, ses décisions doivent être sûres. Il représente le jeu et ses règles pour qu’aucun problème ne survienne aux tables. Le directeur doit toujours avoir un temps d’avance sur tous les événements pour éviter les surprises. ”
Pokernews : “Impossible d'anticiper parfois. C'est le propre de l'imprévu, nous pensons au hold up survenu à Berlin en mars 2010 durant le tournoi principal de l'European Poker Tour.”
TK : “Si je pouvais le faire, j'aimerais oublier cet incident à Berlin. Je pense en particulier à la panique dans la salle du tournoi et à ce qu'il s'est passé sur les lieux de l'inscription. Gérer le chaos concernant les jetons des joueurs sur sept tournois différents en cours, c'est mon propre cauchemar de directeur de tournois devenu réalité. J'avais envisagé cette situation théoriquement, mais je ne pensais pas que cela puisse effectivement arriver. J'ai fait en sorte de beaucoup parler aux joueurs et, avec leur aide et leur coopération, nous avons pu reconstruire la situation précédant la confusion et continuer six tournois. Nous avons dû en supprimer un, il avait débuté deux heures avant le même jour."
Pokernews : “Revenons à des situations plus usuelles. A quelles difficultés majeures et prévisibles un directeur de tournoi est-il confronté au cours du jeu ?”
TK : “C’est un fait qu’il existe peut être vingt points de règles au poker, mais ils génèrent une centaine de situations particulières. Et parfois, vous ne pouvez pas mettre une situation sur une règle. Nous sommes confrontés à une “zone grise” du tournoi. C’est cette catégorie qui créé le plus de difficulté. Je pourrais écrire un livre là dessus. Sur les tournois de poker de haut niveau, les décisions mettent en jeu plusieurs centaines de milliers d’euros sur une main. Il est nécessaire de penser à l’avance ces difficultés afin d’y être préparé et d’apporter la réponse adéquate. Par exemple, lors du showdown, à l’abattage des cartes par les joueurs, il existe un haut risque de confusion lorsque les joueurs disent “call” ou “fold” en anglais. Les deux termes ne se différencient pas vraiment dans la prononciation. Et lorsque le joueur retourne ses cartes, la confusion est totale."
Pokernews : “Un exemple ?”
TK : “C’est arrivé deux fois lors du coup d’envoi du dernier European Poker Tour (EPT) à San remo. Je me souviens particulièrement d’un flop Q-X-X avec deux joueurs en tête à tête, le premier mise, le second est all in. Le premier joueur dit quelque chose, le croupier n’a pas bien entendu : “fold” ou “call” ? Le croupier pense que le joueur passe et prend les cartes du joueur qui conteste. La direction du tournoi doit intervenir. Ses cartes étaient retournées, K-Q. Nous avons estimé qu'il s’agissait d’un joueur ayant suivi la mise à tapis puisqu'il avait montré ses cartes."
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Pokernews : “Quel serait votre conseil pour les joueurs dans cette situation de jeu ?”
TK : “Mon conseil : le joueur doit s’assurer d’être très clair dans ces situations en live. Sur Internet, l’action est plus limpîde à la table, l’action “fold” ou “call” est dictée par deux boutons différents. En live, la règle numéro un est de ne jamais se séparer de ses cartes avant d’avoir reçu le pot. Les cartes sont toujours votre ticket de reçu pour le pot. Pas de carte, pas de pot. Vos cartes doivent être placées sous vos mains pour éviter que le croupier ne les ramasse et force la décision. La règle numéro deux est celle-ci : si les cartes sont ouvertes au showdown, le joueur est censé avoir suivi, si les cartes sont fermées, il s’est couché.”
Pokernews : “Quel sont selon vous les caractéristiques d’un tournoi de poker moderne de qualité ?”
TK : “Une belle salle de poker dans un casino d’une ville attractive. Des tables, des cartes et des jetons de qualité. Une équipe de gestion du tournoi entraînée. Tous ces critères sont dans ma liste lorsque je choisi ou non de venir sur un tournoi. La structure, c’est à dire l’augmentation des blinds, doit être régulière et douce. L’augmentation de niveau en escalier ne doit pas dépasser 50% à chaque hausse. Sur la profondeur de tapis idéale, tout dépend du tournoi auquel vous êtes confronté, c’est à dire un tournoi principal, un tournoi annexe, un satellite... Personne ne veut d’un tournoi satellite deepstack à 30.000 jetons."
Pokernews : “En 2009, l'European Poker Tour a fait évoluer sa structure face aux critiques des joueurs. Le tournoi principal proposait trop d'accélérations justement et privilégiait au final la chance sur la stratégie.”
TK : “La structure de l'EPT avec un tapis de départ de 10.000 jetons et des niveaux de 60 minutes avait fonctionné durant cinq ans. Elle avait fait sont temps. Nous savions que nous devions la changer cette année là car le poker avait évolué avec l'arrivée en masse de qualifiés online et l'augmentation des tickets d'entrée. Nous avons impliqué des joueurs dotés d'un savoir en mathématiques pour recueillir leur opinion sur la meilleur structure jouable pour un tournoi de cette envergure et sur un nombre de jours donné. Nous sommes tombés d'accord sur un jour supplémentaire de compétition et la structure existante, 30.000 en jetons, des niveaux 60 minutes lors du Jour 1 et de 75 minutes par la suite."
Pokernews : “Outre les tournois de poker internationaux, sur quelles activités opérez-vous ?"
TK : "J'ai différents clients parmi les salles de poker en ligne, parmi lesquelles Pokerstars pour les EPT, Full Tilt Poker, Everest Poker, Unibet et 888. J'essaye de rester indépendant et de travailler avec tout le monde, c'est très important. Parmi les casinos live, je travaille avec le Concord Card à Vienne et le casino de Dortmund en Allemagne. En production télévisuelle, je suis partenaire d'un plateau à Cardiff au pays de Galles. Nous avons tourné des tournois sur une table comme Late Night Poker depuis ses débuts en 1998, Nations Cup, Celebrity Tournament mais aussi le Million Euro Challenge en Allemagne et dernièrement le Full Tilt Poker Lounge qui est actuellement diffusé sur Channel 4. Le Poker Lounge est la nouvelle version du show tv à succès Poker After Dark."
Pokernews : “Merci Mr Kremser d'avoir pris le temps de vous entretenir avec nous. Ah, dernière question... La marque de votre costume ?”
TK : “Versace, à 90% du temps. Merci et à bientôt sur les tournois.”
Où se qualifier pour un tournoi live ou tv sur une salle de poker légale en France ?
L'Autorité de Régulation des Jeux en Ligne dresse depuis le 8 juin 2010 une liste de salles de poker sur Internet disposant d'un agrément en France. partypoker.fr, everestpoker.fr et bwin.fr sont parmi celles-ci. Consultez la liste des rooms de poker légales en France.
