Jean Montury : "Prouver que ce n'était pas un one time"
L'une des plus belles victoires françaises. La semaine dernière, Jean Montury a remporté la toute première édition de l'EPT Malte au cours d'un heads-up 100% tricolore, contre Valentin Messina. Une victoire qui lui permet de remporter la somme de 687 400€. Retour sur cette semaine folle et intense où le nouveau champion a également atteint trois autres tables finales. Entretien.
Tu as remporté la première édition de l'European Poker Tour Malte. Racontes nous un peu. Quel est ton ressenti ?
Je suis extrêmement heureux. C'est une joie intense mais aussi une grande fierté. J'attends ce moment depuis longtemps. C'est le fruit d'un travail conséquent et je perçois cela comme un tremplin pour la suite... Même si je sais que le titre est désormais définitivement acquis.
Considères-tu cette victoire comme une consécration ?
Gagner un EPT est automatiquement une consécration. Ce sont les tournois aux fields les plus relevés au monde et donc les plus difficiles à remporter. Au lendemain de ce triomphe, mon ambition est de remporter un autre titre majeur afin de consolider cette place de numéro un français 2015 et prouver à toute la communauté poker que ce n'était pas juste un one time.
Tu as joué sur une Table Finale très relevée, notamment avec la présence de Dominik Panka ou Valentin Messina. Quel joueur été le plus compliqué à jouer ? Par quels moyens as-tu réussi à les "gérer" ?
Dominik Panka, avec son palmarès, sa froideur et son aura, est un joueur extraordinaire. Mais il a toujours dû évoluer en tant que short stack. J'avais la position sur lui, ce qui me permettait de pouvoir le contrôler. Valentin Messina, avec son gros tapis, a été le joueur le plus compliqué à jouer. Ma stratégie durant cette TF était donc de jouer le maximum de pots post flop avec un jeu solide et précis.
Quels rapports entretiens-tu avec Valentin Messina ? Ce geste très fairplay de la main sur son épaule à la fin du HU a fait le tour du web...
Valentin et moi avons fini le Jour 1 et 2 à la même table. Pour ensuite évoluer ensemble tout en haut du chipcount jusqu'à ce fameux heads-up. Hormis un léger désaccord concernant l'un des mes call contre Dominik Panka au début de la TF, nous avons toujours été d'un soutien mutuel sans faille. C'est un très grand joueur qui a une analyse technique très poussée. La superbe photo de Neil (Stoddart, ndlr) a effectivement fait parler d'elle... Elle est très réussie. Avec le recul, ce geste spontané s'explique : qui, après 5h10 de HU, pouvait mieux comprendre sa déception ?
Au cours du festival maltais, tu as atteint trois tables finales sur des tournois aux variantes non autorisées en France. Comment t'y es-tu mis à jouer ? Que penses-tu de leur interdiction sur l'Hexagone ?
J'y joue depuis très longtemps dans des parties privées et lors de mes déplacements à Las Vegas. Ma variante préférée est le 7stud high/low. Je trouve extrêmement préjudiciable pour le poker en France l'interdiction de ces variantes.
Envisages-tu de passer professionnel ?
L'obtention d'un titre majeur comme un EPT me pousse évidemment à y réfléchir. Mais avant toute chose, je souhaite confirmer ce titre par d'autres performances sur le circuit mondial.
Une victoire EPT peut susciter l'intérêt de nombreux opérateurs. Un sponsoring, ça te tenterait ?
Le sponsoring est évidemment la quête de tout joueur de poker du circuit international... Et je pense pouvoir être un excellent ambassadeur.
Tu as remporté plus de 687 000 euros, une sacrée somme. Comptes-tu renflouer le RC Lens, l'Arras Golf Resort ou plutôt partir aux Bahamas ?
Rien de tout ceci ! J'ai l'intention de continuer les tournois. Les frais sont généralement nombreux. Par ailleurs, j'ai des projets personnels en cours avec l'achat d'une maison. Cette somme remportée va me permettre de les réaliser plus confortablement. Pour sauver le RCL et l'Arras Golf Resort il faudrait que je gagne le Main Event des World Series of Poker.
Ton avant-bras droit est marqué d'un tatouage de l'hôtel Encore du Wynn, à Las Vegas, qui accueille notamment le spectacle du Cirque du Soleil. En retour, on te paye l'hébergement, on te file des places ?
Je n'avais jamais rien demandé mais ce sont de bonnes idées, d'autant que j'y réside tous les ans pour les WSOP ! Plus sérieusement, c'est une démarche très personnelle. J'aime la typographie et le mot a beaucoup d'autres sens pour moi...
Avant le poker, tu as notamment été capitaine de l'équipe de France de billard. Qu'est-ce que cette discipline t'a apporté dans la vie ?
Pour évoluer à très haut niveau dans toute discipline, il faut absolument avoir une volonté et une concentration à toute épreuve. Gagner deux fois les championnats du monde en menant l'équipe de France de billard m'a apporté une grande confiance en moi, ainsi qu'une importante capacité d'adaptation. Il ne suffit pas d'y croire, il faut aussi comprendre et analyser ses faiblesses pour progresser constamment.
Quels sont, selon toi, les points communs entre ces deux sports ?
Il faut absolument être bien dans sa tête et dans sa vie afin de pouvoir être concentré et performant à table.
Quel a été ton parcours de joueur de poker ?
J'ai commencé à jouer aux cartes très jeune avec ma grand-mère. Une vraie passionnée. J'ai débuté le poker dans les arrières salles obscures avant de découvrir le Texas Hold'em à Las Vegas, en 1995. Je joue en live depuis des années et occasionnellement sur le circuit depuis 2009. En 2015, j'ai la chance de pouvoir m'y consacrer pleinement et je m'en réjouis.
Actuellement, quel regard portes-tu sur la situation du poker en France ?
Je déplore sincèrement la perte de l'unique EPT français. Je suis également attristé pour le groupe Barrière qui, au vu de ses compétences, mérite d'organiser de grandes compétitions internationales...
Quel est ton programme pour les prochains mois ?
Je vais jouer le World Poker Tour Monténégro et Venise pour ensuite rejouer mon circuit de cœur, le BPT Deauville qui s'annonce festif. Puis ce sera le retour aux compétitions internationales avec la grande finale EPT à Monaco avant quelques jours de repos et un départ pour les WSOP, à Las Vegas, tout début juin.
Classement de la Table Finale :
Vainqueur : Jean Montury (France) - 687 400€ après deal
Runner-up : Valentin Messina (France) - 615 000€ après deal
3e: Dominik Panka (Pologne) - 347 300€
4e: Stefan Schillhabel (Allemagne) - 260 500€
5e: Javier Gomez Zapatero (Espagne) - 205 300€
6e: Hossein Ensan (Allemagne) - 153 700€
