Dépression, addiction, homophobie : Les confidences de Vanessa Selbst
A 31 ans, Vanessa Selbst est l'une des grosses pointures du circuit. Dans un portrait que lui consacre le Financial Time, la joueuse se confie. Homosexualité, famille, addiction, argent...Elle évoque tous les sujets. Morceaux choisis.
Rounders
Au lycée, inspirés par le film de Matt Damon, ‘Rounders’ (Les joueurs), Vanessa Selbst et ses amis ont commencé à jouer au poker, et quand elle a recommencé à jouer à l’université, en étudiant les sciences politiques, la période a coïncidé avec le boom du poker en ligne.
“Nous étions la première génération des joueurs en ligne, les premiers vraiment bons joueurs” se souvient-elle, avec le ton de qui débite des statistiques. “La plupart des professionnels du poker, avant, c’étaient ces types un peu voyous qui n’avaient pas eu de grandes chances dans la vie et qui étaient, genre, ‘Je me vois pas dans une carrière traditionnelle, je vais aller tenter ma chance à Vegas’. Ils n’avaient rien à voir avec ces jeunes bons en math qui vivaient chez eux ou à l’université, avec beaucoup d’opportunités, mais qui ont commencé alors à gagner beaucoup d’argent en appliquant la science des statistiques au poker. C’était une génération différente, et c’est là que nous étions.”
Le poker comme refuge
Sa mère est morte brutalement d’un problème intestinal en 2005, alors que Vanessa Selbst faisait des recherches sur le mariage gay en Espagne avec une bourse Fulbright. Choquée, elle a abandonné ses études pour passer ses nuits à jouer au poker. Ce qu’elle décrit comme une “quasi-dépression”, dans un sens obscur, a fait d’elle une grande joueuse.
“Ce n’est pas que vous devriez jouer uniquement quand vous êtes très malheureux, mais c’était un tel refuge. Si je n’avais pas eu une année si difficile, peut-être que je n’aurais jamais atteint ce niveau. Ce fut mon année la plus intense au poker, ce qui est une approche assez bizarre, morbide, de tout ça”
"Je trouve le poker vraiment addictif"
“Je ne me suis jamais prise pour une pro du poker” dit-elle. “Le poker est plutôt comme un thème récurrent dans ma vie. C’est comme un frère énervant qui n’arrête pas de vous embêter, du genre ‘viens jouer avec moi’. Je suis toujours en train d’essayer de lui échapper et de faire mes propres trucs, et il dit toujours ‘non, reviens’. C’est addictif, dans un sens. Je sais qu’il y a des gens qui luttent contre l’addiction aux jeux. Moi, je trouve le poker vraiment addictif, comme je trouve Candy Crush vraiment addictif. Gagner ou perdre de l’argent n’a rien à y voir.”
"J'ai été discriminée"
Vanessa Selbst ne cache pas son homosexualité et signale qu'elle s'est sentie discriminée à quelques reprises. “J’ai été discriminée, mais pas en tant que femme. Pour mon look de femme gay. J’ai raté des opportunités, ça c’est sûr.” Elle dit qu’elle est au courant d’au moins un contrat de télévision qu’elle n’a pas eu. “Ils ont dit que nous n’aurions pas eu autant de spectateurs, ou je sais pas quoi. C’était peut-être vrai, ou faux. Je n’y attache pas vraiment d’importance. Ce n’est pas ma bataille. Ça pourrait l’être, mais je ne veux pas que ça le soit.”
Pendant ses études de droit, Vanessa a milité en tête de l’Alliance Queer-Straight à Yale. Elle a fait campagne contre ce qui était vu comme de la discrimination dans le traitement par la police des plaintes contre les fêtes d’étudiants gay ou hétérosexuels. Et elle faisait du bénévolat pour des associations locales. Récemment, elle a été à l'initiative d'un tournoi caritatif.
Avec plus de dix millions de dollars de gains en tournoi live, Vanessa Selbst a réussi avec brio à s'imposer comme une adversaire redoutable sans abandonner ses convictions, sa combativité et son activité de militante.