Fedor Holz : "Je garde les pieds sur terre"
Fedor Holz s'est confié à Gaëlle Jaudon en exclusivité pour Live Poker. Dans cette interview, le jeune allemand revient sur ses succès et fait preuve d'une belle maturité. Extraits.
Après deux années 100% poker et de très gros résultats online et live, Fedor Holz souhaite désormais "prendre du recul avec le grind et ne pas jouer s'il n'en a pas plus envie que ça". Le "plaisir" doit être la principale motivation : "Je veux me concentrer sur ce qui me plait vraiment aujourd'hui, jouer les super high rollers et voyager. Je ne vais plus faire toutes les étapes du circuit comme avant, d’autant que je n’ai par exemple jamais été approché pour un éventuel sponsoring. Mon objectif principal serait de gagner un tournoi majeur [...] pour avoir un autre beau trophée !"
Après avoir évoqué sa découverte du jeu à 16 ans lors de parties entre amis à 50 cents, Fedor Holz passe à son apprentissage sur le net. Trouve sa voie, s'évaluer en permanence sont des aspects qui ont séduit le débutant. "J'aime aussi la variance, elle permet de pouvoir s'auto-juger, beaucoup de joueurs de tournois pensent qu'ils sont bons alors que ce n’est pas le cas, c’est juste la variance qui les a aidé. C'est une donnée importante qui rend le jeu plus intéressant", ajoute celui qui considère "Dan Colman et Christoph Vogelsang comme les meilleurs actuellement. "Ils ont vraiment un niveau très poussé".
Le joueur allemand parle ensuite de la nécessité de se fixer des objectifs. "Si je n’atteins pas l'objectif ce n'est pas très grave ou décevant car au moins je sais que j'ai tout fait pour l'atteindre, et je n'ai pas à m'en vouloir", explique Holz qui se focalise plus sur "l'effort fourni" et le fait de "rester concentrer et savoir où il va".
Plus trop intéressé par le coaching, il pense "avoir fait le tour", Holz parle de sa passion pour les voyages mais aussi des changements induits par la notoriété. Après la surprise initiale, il avoue que cela "peut être assez ennuyeux parfois quand certaines personne en font trop". Etre suivi est un booster, "c'est très encourageant", poursuit-il avant de dévoilé sa méthode :
"Le secret pour améliorer son jeu est avant tout d'avoir une vie saine. J'ai fait d’énormes progrès quand j'ai commencé à faire plus attention à moi, c’est là que j’ai véritablement explosé, car j'étais plus concentré et calme".
Outre le travail technique proprement dit, Fedor Holz précise aussi comment il se prépare pour les Super High Rollers. "J'ai tendance à prendre plus de temps avant pour faire de l'exercice et de la méditation, manger sainement, j’arrive en avance à la poker room, j'ai une routine plus importante pour me sentir détendu et serein", détaille-t-il avant d'avouer qu'il est moins précis en ce moment et un peu plus distrait dans l'approche des gros tournois qu'il dispute.
"C'est très dur de trouver le bon équilibre. Tout se passe tellement vite pour moi qu'il faut apprendre et s'adapter en très peu de temps", ajoute celui qui compte déjà plus de 8 millions de dollars de gains en live ! Une fortune qui attire des gens pas très bien intentionnés : "C'est compliqué d'être à la fois cool, gentil mais sérieux, il faut se comporter comme un businessman, mais c'est vraiment difficile car je veux aussi juste m'amuser et avoir des amis".
Fedor Holz sait bien que les étoiles filantes sont très nombreuses dans le poker mais il "garde les pieds sur terre". "La clé pour rester soi-même c'est son entourage [..] vos faux amis vous pousseront à sortir et faire n'importe quoi", tranche le petit génie qui est bien conscient d'être devenu adulte un peu plus vite que les gens de sa génération.
"Je ne me sens pas du tout mieux que des jeunes de 20-21 ans, j'aime beaucoup discuter et rencontrer des gens et ce serait cool, mais c'est juste que je n'ai pas les mêmes envies ni les mêmes motivations que ceux de mon âge [...]. Il m'a fallu environ un an pour réaliser que je ne pouvais pas [...] me retrouver dans un job qui ne me rendrait pas heureux pendant 40 ans.", commence-t-il avant de parler du regard des autres qui est parfois lourd à supporter pour les joueurs professionnels. "Je n'ai pas la même vision et la même ambition que ceux de mon âge. Cela rend les gens à la fois contents et inconfortables,content car ils voient que j'ai de vrais objectifs, et inconfortables car c'est très différent du chemin de vie qu'ils ont choisi", ajoute Holz.
Fedor Holz se caractérise par sa soif d'apprendre et son envie de voyager, de découvrir. Installé depuis peu à Vienne, il se passionne pour une ville "géniale pour vivre" où on peut tout faire à pied et où le .com est accessible. Alors que les WSOP commence dans moins de trois semaines, Fedor confie que sa découverte de Las Vegas "s'est vraiment résumée à (s)e réveiller, préparer quelque chose à manger, aller jouer toute la journée et (s)e recoucher".
"J’ai essayé d'éviter au maximum tous les clubs et la folie du strip, ce n'est pas vraiment mon truc. Il y a beaucoup de gambling et de jeux partout, ce qui n'est pas dans ma mentalité, j'aime la compétition, donc c'était vraiment l'endroit ou il fallait être à cause des WSOP, mais tout le côté brillant et excessif de Vegas ne me plait pas vraiment", raconte celui qui a terminé 25e du Main Event et sera de retour aux Etats-Unis pour les championnats du monde.
"Je ne vois pas vraiment une longue carrière dans le poker"
Gaëlle Jaudon interroge le jeune pro sur de nombreux sujets et notamment l'aspect social du jeu, Holz cherchant à s'améliorer de ce côté là car "c'est important pour tout le monde de vivre une expérience plus détendue et sympathique". Ancien Fan-boy devenu star du poker, Fedor ne refuse pas un petit pari "fun ou autour du sport" mais regrette l'égocentrisme du milieu.
"Ce que j'aime le moins dans le poker c'est cette tendance à parler les uns sur les autres et à se critiquer. Je le faisais moi-même quand je jouais énormément et que je n'avais que le jeu en tête, mais je suis vite passé à autre chose", annonce-t-il avant de terminer par quelques conseils basiques.
"Aujourd'hui je ne vois pas vraiment une longue carrière dans le poker. Je m'imagine faire quelque chose de totalement différent dans 5 ou 10 ans. [...] Construire moi-même ma maison par exemple c'est quelque chose qui me plairait vraiment.Je n'ai pas vraiment de projets sérieux encore, j'ai ma base de coaching et de stacking avec quelques personnes qui fonctionne bien donc je me concentre là-dessus", finit-il avant une ultime réflexion sur l'humanitaire.
"Je suis loin d'être un saint et j’en fais très peu par rapport à d'autres personnes. [...] Le temps est plus important que l'argent, même si c’est essentiel. Donner de son temps est une meilleure chose que juste envoyer des chèques. J'ai beaucoup de respect pour les gens qui s'investissent entièrement dans des projets humanitaires. J'ai fait des dons et [...] je travaille régulièrement avec des associations au Chili où je vais retourner cette année [...] Je veux trouver du temps hors poker pour des choses importantes".