Jeux d'argent en ligne : Le projet de loi se précise mais prend du retard
Le 21 juillet 2009 s'est réunie la Commission des Finances de l'Assemblée Nationale afin de discuter du projet de loi relatif à l'ouverture du marché des jeux d'argent en ligne. Le chiffre d'affaire des sociétés opérant illégalement sur le territoire national est d'ores-et-déjà estimé à entre 3 et 4 milliards d'euros par an. Le manque à gagner fiscal pour l'Etat est énorme et aucune loi ne permet aujourd'hui d'encadrer ce marché, que ce soit pour protéger les mineurs, les joueurs compulsifs ou lutter contre le blanchiment d'argent.
Rappelons que seule les paris sportifs à côté fixe, les paris mutuels hippiques et le poker en ligne (qui représente à lui seul 75% du marché des jeux de casino) seront concernés par le projet de loi, les autres jeux de table et types de pari n'étant pas destinés à être légalisés en ligne.
Le Ministre du Budget Eric Woerth ainsi que le rapporteur du projet de loi Jean-François Lamour ont exposé devant la Commission la philosophie du texte, avant que ne soient votés plusieurs amendements. Il ressort de cette présentation et des amendements adoptés (qui devront maintenant être validés par le Sénat) un certain nombre d'informations nouvelles :
Les taxes sur le poker en ligne plafonnées à 1$ par pot ?
Tant le Ministre du Budget que le Rapporteur du projet de loi à la Commission des Finances semblent avoir pris conscience du fait que la fiscalité prévue pour le poker en ligne (2% des mises des joueurs) est inadaptée, ne rendra pas l'offre légale suffisamment attractive pour les joueurs et ne permettra pas aux opérateurs de faire des bénéfices.
Jean-François Lamour déclare ainsi que "lutter contre les sites illégaux et assurer la viabilité de l'offre légale de jeux et paris passent aussi par le renforcement de l'attractivité de celle-ci, mise à mal par une fiscalité parfois mal adaptée. Je pense en particulier au poker en ligne qui, en raison de son modèle économique, ne pourra pas se développer si le niveau de taxation actuel des mises est maintenu".
Si aucun amendement précis n'a encore été pris en Commission pour rectifier le tir, le député Daniel Fasquelle devrait proposer prochainement une modification visant à plafonner la taxation à 1$ par pot. Un chiffre récemment confirmé par Sébastien Proto, Directeur adjoint du cabinet d'Eric Woerth, dans une interview accordée à l'émission de radio d'un célèbre forum de poker en ligne.
Pas de plafonnement du nombre de licences
Les licences seront délivrée pour 5 ans, renouvelables. Le nombre de licences n'est pas plafonné, Eric Woerth souhaitant que "que tous les opérateurs qui démontreront qu'ils respectent effectivement le cahier des charges défini par la puissance publique puissent en obtenir un."
Les outils de lutte contre les sites illégaux
Trois outils de blocage seront à disposition de la puissance publique, afin de décourager les opérateurs ne se conformant pas au cahier des charges :
• contraindre les fournisseurs d'accès à bloquer les opérateurs illégaux sur le territoire français;
• contraindre les banques françaises à bloquer les transactions financières entres joueurs et opérateurs illégaux;
• interdire toute publicité sur les médias français aux opérateur illégaux. Selon Eric Woerth, "Les diffuseurs ayant méconnu cette règle s'exposeront à une amende pouvant aller jusqu'à quatre fois le montant de la dépense publicitaire engagée".
Le Gouvernement résiste à la Commission Européenne sur le TRJ
- le Taux de Retour au Joueur (TRJ) restera plafonné à 85%, afin de limiter les effets d'addiction et l'attractivité des opérations de blanchiment. La Commission Européenne, dans son avis circonstancié rendu en juin dernier, s'oppose à ce plafonnement autoritaire, expliquant que le lien entre addiction et plafonnement du TRJ n'a pas été prouvé. Le Gouvernement français persiste pourtant, arguant d'un "principe de précaution", notion juridique bel et bien reconnue par l'Union Européenne.
Charles de Courson (Député Nouveau Centre et membre de la Commission) prend le parti de l'UE et estime que "de nombreux spécialistes considèrent [le plafonnement du TRJ] comme une erreur .(...) Toutes les études montrent que c'est le plafonnement de la mise par joueur, et non pas celui du TRJ, qui permet de limiter l'effet d'addiction".
La date du 1er janvier 2010 ne sera pas tenue
En raison d'un embouteillage législatif, la loi, initialement prévue au 1er janvier 2010, aura du retard. Jean-François Lamour a expliqué devant la commission des finances que son entrée en application ne se ferait plus, au mieux, qu'à la fin du premier trimestre de l'année prochaine. Plusieurs opérateurs, qui n'ont pas encore démarré leur activité sur le marché français, menacent déjà de se lancer dès le 1er janvier, quoi qu'il arrive.
Pour apaiser leurs craintes, Eric Woerth a expliqué que les compteurs devront nécessairement "être remis à zéro" lors de l'ouverture officielle du marché, afin que les opérateurs qui opèrent déjà illégalement dans notre pays ne puissent pas se prévaloir de l'avance prise pour écraser la concurrence. Mais le Ministre n'explique pas quels mécanismes se cachent précisément derrière cette "remise à zéro".
Un droit de propriété reconnu aux fédérations sportives
Le projet de loi reconnaît aux fédérations sportives un "droit de propriété sur les événements sportifs". Selon le ministre, "Les organisateurs d'événements sportifs pourront signer des accords contractuels avec ces opérateurs, leur permettant notamment de leur faire prendre des engagements en matière d'éthique et de protection des compétitions".
Mais qui dit accord contractuel dit également contrepartie financière. En somme, la loi fera obligation de rémunérer les fédérations sportives pour toute activité de pari sur les manifestations qu'elles organisent. Sans surprise, la Fédération Française de Football et la Fédération Française de Tennis ont déjà fait part de leur soutien plein et entier à cette dernière mesure.
Charles de Courson, encore lui, estime un tel dispositif dangereux, "car il ouvre la voie à des discussions bilatérales avec certaines fédérations sportives, au détriment du reste du mouvement sportif. Ne vaudrait-il pas mieux adopter le système italien, qui ne reconnaît pas ce droit de propriété et fiscalise le dispositif pour alimenter un fonds national dont le CNOS italien répartit les moyens, ce qui a permis de doubler le montant réparti entre les fédérations ?".
En outre, la création d'un tel droit de propriété pourrait fort bien se révéler inconstitutionnel car en contradiction avec l'un des droits fondamentaux garantis par la Constitution, le Droit à l'Information. Si l'information est gratuite et n'appartient à personne, sur quelle base juridique pourrait-on obliger qui que ce soit à partager les bénéfices qu'il en tire ?
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