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Psychologie du Poker - le Principe de Premack

Psychologie du Poker - le Principe de Premack 0001

En observant des enfants dans les années 60, David Premack a remarqué que certains parents utilisaient un comportement de leurs enfants pour en renforcer un autre. Par exemple, votre petit garçon aime jouer aux jeux video mais n'aime pas ranger sa chambre. Vous, le parent, voulez que la chambre soit rangée et voulez également que votre enfant passe moins de temps devant les jeux vidéo. Un comportement (jouer aux jeux video) se produit souvent et de manière fiable; un autre (ranger sa chambre) arrive moins souvent et sans aucune fiabilité. C'est pourquoi le parent sage (ou manipulateur) décide de n'offrir du temps de jeu vidéo que si la chambre est rangée. Un comportement sert de récompense à un autre. Oui, bien sûr, il y a un débat éducatif sur les incitations à base de récompense, mais il n'en reste pas moins vrai que la plupart des parents choisiront cette voie pour que le ménage soit fait. c'est du donnant-donnant.

Le principe de Premack en pratique

L'année dernière, durant un tournoi préliminaire de NLHE aux World Series Of Poker (WSOP), je me suis tout d'un coup souvenu du principe de Premack. J'observais cinq joueurs professionnels, assis pratiquement dos-à-dos à quatre tables différentes; Parmi eux, il y avait Phil Hellmuth, Mike Matusow, Layne Flack et Huck Seed. Le cinquième restera anonyme parce que c'est lui qui avait recours à une des formes du principe de Premack et, bien que je vous livre aujourd'hui la-dite stratégie, je ne suis pas prêt à vous révéler son nom. Appelons-le... Bill.

Voici ce qui s'est passé. On n'en était encore qu'au premier niveau de la partie, si bien qu'avec la profonde structure des WSOP, il y avait très peu de jetons en jeu en comparaison de la taille du tapis moyen. Les cinq pros discutaient tous ensemble, faisant des paris sur qui tiendrait le plus longtemps ou se tenant au courant des autres paris en cours à ce moment-là pendant les World Series. A ce stade du tournoi, ils étaient beaucoup plus impliqués dans leur conversation que dans le jeu proprement dit.

Un joueur apparemment distrait

Bill était le plus éloigné du centre de la conversation, si bien qu'il devait constamment se pencher en arrière sur sa chaise pour pouvoir s'entretenir avec ses collègues. En fait, il était souvent debout, dos à sa table. En position assise, Bill a joué pas mal de mains, qu'il couchait au flop ou au turn sur des continuation bets adverses. Apparemment, il allait voir des flops mais ne voulait pas se retrouver impliqué dans de gros pots. Lecture facile. Il avait l'air tellement plus intéressé par sa conversation que par les cartes qui lui étaient distribuées...

Arrive un moment, peut-être trente mains après le début du tournoi, où Bill jette un coup d'oeil à ses cartes et relance, sa première relance de la partie. Il fait attention à la main, puis suit une mise sur le flop K-8-6. Lorsqu'un 2 apparaît à la rivière et que son adversaire mise à hauteur du pot, Bill réfléchit une minute entière puis montre une paire de dames en la défaussant. L'autre joueur retourne A-K et la partie continue. Bill retourne à ses copains et jette un bon paquet de mains pré-flop.

Le piège se referme

Lorsque les joueurs reviennent de la première pause de la journée, après le niveau 1, Bill reste debout. Il regarde ses deux premières mains et les jette tout en comparant les structures de blindes des WSOP et des EPT avec Mike Matusow. Lorsqu'il daigne finalement s'asseoir, c'est pour continuer de plus belle sa conversation avec les autres tables alentour. Puis arrive cette main.

Un joueur en début de parole ouvre en relançant; ce joueur déjà raflé plusieurs pots à la barbe de notre pro grâce à des mises post-flop. Bill calle pré-flop tout en parlant avec Phil Hellmuth d'un tournoi de charité à venir. Sur le flop A-K-8, le relanceur en début de parole mise un tiers du pot et Bill calle, toujours en pleine conversation avec Phil. Le turn est un 6 et le relanceur initial mise la moitié du pot cette fois; Bill doit demander confirmation de la taille de la mise parce qu'il ne faisait pas vraiment attention, ce dont il s'excuse puis il calle. La rivière apporte un autre Roi et, après une mise de la taille du pot de la part de notre agresseur, Bill décide de relancer. L'autre fait immédiatement tapis et Bill calle tout aussi rapidement. Le croupier s'écrie "All in et un call!" pour les caméras d'ESPN qui se trouvent à proximité et Huck Seed et Layne Flack se lèvent tous les deux de leur chaise pour voir ce qui se passe. Lorsque tout le monde est prêt, le relanceur initial retourne A-K, pour un full par les Rois, et notre professionnel distingué retourne les As, pour un full par les As. Il remporte le coup et double.

Donnant-donnant ne veut pas forcément dire 50-50

En s'éloignant de la table, Huck demande à Layne: "Ils croyaient vraiment que Bill ne faisait pas gaffe?"

Est-ce que Bill avait préparé son coup? Oh oui. Je le sais parce que je le lui ai demandé à la pause suivante. Il n'a pas appelé ça le principe de Premack mais moi si. Laissez vos adversaires faire quelque chose qu'ils aiment faire — prendre vos jetons en vous expulsant du coup — et incitez-les ainsi à faire quelque chose qu'ils ont moins l'habitude de faire, comme par exemple jouer un gros pot hors de position lorsque vous ne vous couchez pas.

Ndr : Tous nos articles psychologiques sont disponibles dans notre rubrique "psychologie du poker". N'hésitez pas à aller y jeter un coup d'oeil!

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