Poker à Cadet : Les croupiers ont la parole
Vendredi 8 avril 2011. Nous avions rendez-vous au Cercle Cadet à Paris pour inaugurer une nouvelle série d'articles PokerNews qui, comme leur titre l'indique, sont destinés à recueillir les confidences d'une composante habituellement discrète du personnel de salle : les croupiers.
Tenus à une stricte neutralité, cantonnés aux annonces sur les mains en cours, les croupiers sont des figures familières des joueurs de cercle et de casino mais leurs états-d'âme restent mystérieux pour la plupart d'entre nous. Après avoir plaidé notre cause auprès du Directeur des Jeux et lui avoir expliqué le but de notre démarche, nous avons donc été autorisés à nous entretenir avec deux jeunes croupiers de Cadet : Samuel et Siham.
Samuel et Siham, croupiers à Cadet
Samuel a été embauché pour l'ouverture du Cercle il y a un an tandis que Siham n'est croupière à Cadet que depuis six mois. C'est leur première expérience professionnelle à tous les deux. Certains des croupiers sont formés en interne, le Cercle offrant un stage de formation tous les mois, que ce soit pour le poker ou les jeux de table. D'autres sont embauchés après leur sortie de l'IFCP, qui forme également les croupiers de l'Aviation-club de France.
C'est le cas de Samuel et de Siham, qui ont suivi là-bas une formation de quatre semaines, intégralement consacrée aux quatorze variantes du poker. Cette formation coûte 1.600€ mais est actuellement synonyme d'emploi garanti pour ceux qui décident de la suivre. Un argument qui fait souvent mouche et explique en grande partie le succès croissant de la profession.
Nos deux croupiers ont ensuite parfait leurs compétences directement à Cadet, en commençant par les tournois du Cercle, où ils se sont fait la main. Les croupiers plus aguerris migrent ensuite rapidement vers les tables de cash-game, sur lesquelles la rapidité d'exécution prime.
Leur motivation
- PokerNews : Bonjour à tous les deux. Qu'est-ce qui vous a fait embrasser cette profession ? Le marché porteur ou la passion du poker ?
- Samuel : Tous les croupiers du Cercle sont passionnés de poker, sans exception. Comme on n'a pas le droit de fréquenter des établissements à moins de 100km de notre lieu de travail, on s'organise d'ailleurs très régulièrement des parties privées entre nous. Sinon, il nous reste le Multicolore à Reims.
- Siham : On joue aussi pas mal sur Internet.
Les horaires
- PokerNews : Quels sont les horaires-type d'un croupier à Cadet ?
- Siham : On fait deux journées et deux nuits par semaine. Les horaires de nuit sont fixes, de 21h à 6h du matin. En journée, ce sont des 'shifts' de 7h (14h-21h, 15h-22h ou 16h-23h). On redoute un peu le vendredi soir, qui est le moment le plus chargé de la semaine, à cause du tournoi à 100€ qui attire régulièrement plus de 100 joueurs. A mesure qu'ils sautent, les joueurs partent se refaire en cash et les tables du Cercle sont prises d'assaut. Le vendredi, il y a vraiment beaucoup de boulot.
- Samuel : Mais il arrive aussi qu'on nous demande des extras, payés en heures supplémentaires. Et là ça peut devenir Rock'nRoll. Lorsque tu as enchainé une journée et une nuit, que tu as bossé 15h non-stop jusqu'au petit matin et que tu reprends le lendemain en milieu d'après-midi, c'est là que les erreurs peuvent arriver. Il faut être deux fois plus vigilant...
Joueur je t'aime, joueur je te hais
- PokerNews : Qu'est ce que vous trouvez de plus agréable et de plus désagréable dans votre métier ?
- (en choeur) : les joueurs !
- PokerNews : Agréable ou désagréable ?
- (Bis) : Les deux !
- Samuel : Chaque table est différente. L'ambiance peut aussi varier en fonction de l'heure ou de la journée. La nuit, la fatigue agit ; les joueurs sont à table depuis plusieurs heures. L'après-midi, ils sont généralement plus cools.
Globalement, la table la plus agréable à dealer, c'est la table finale d'un tournoi. Ce sont souvent les joueurs les plus sérieux qui vont le plus loin, on n'a pas besoin de leur rappeler de poser les antes ou que c'est leur tour de jouer. Ca rigole, tout le monde est de bonne humeur. En cash-game, ils ont l'argent posé devant eux, on sent une tension plus présente. Et puis, evidemment, le caractère de chacun est différent. On a nos préférés. Ce qui ne nous empêche pas de rester absolument neutres. Mais on sait qu'avec certains joueurs, le boulot sera agréable.
- Siham : Moi, ce que je préfère, c'est l'ambiance entre collègues. Tout le monde s'entend vraiment bien. Le plus dur à gérer, parfois, ce sont les horaires. Et certains joueurs. Même si les plus malpolis ne font pas de vieux os. Leurs cartes de membres sont rapidement résiliées.
Souvenirs, souvenirs...
- PokerNews : Votre meilleur souvenir à Cadet ?
- Samuel : Le 'Stars On Fire' ! Avoir des célébrités à la table, c'était très sympa, l'ambiance était au top. On attend le prochain avec impatience.
- Siham : la soirée de Nouvel An aussi était cool. Champagne, menu de fête, l'ambiance était encore plus détendue que d'habitude. J'en garde un excellent souvenir.
- PokerNews : Et votre pire souvenir ?
- (Tous les deux, unanimes) : Les premiers jours de boulot. On était croupiers débutants et les habitués le comprennent très vite. Ils voient arriver un petit jeune qu'ils ne connaissent pas, alors ils te testent.
- Siham : Oui, au début, j'avais un peu honte, j'étais super-tendue. Et quand les joueurs s'amusent à faire de fausses relances ou des 'string bets' (mises en deux temps) pour voir comment tu vas réagir, ça complique encore les chose. Mais bon, je suis une fille...
- PokerNews : Et ?...
- Siham : Honnêtement, c'est plus avantageux. Les joueurs sont plus gentils. On te laisse passer plus de choses. Il y en a même un qui m'a proposé de m'emmener en vacances ! Mais un croupier ne doit pas se laisser corrompre (rires). Bon, parfois c'est le contraire. Il y a une semaine, par exemple, un joueur a quitté la table furibond après avoir perdu un gros coup. Et il a dit tout haut qu'avec un coupier homme, il l'aurait gagné ! Bon, il ne faut pas se laisser déstabiliser. Et puis, ce genre de trucs arrive quand même assez rarement.
Un peu de prospective
- PokerNews : Comment vous voyez-vous dans cinq ans ?
- Samuel : Le but, pour l'instant, c'est d'accumuler de l'expérience. Mais à terme, j'essaierai de progresser dans la hiérarchie. Après croupier, il y a assistant floor, puis floor manager et puis.. (pause) Y a quoi après, Siham ? Un truc style 'Grand Manitou'. Ca me botterait bien,,ça.
- Siham : Moi, j'aimerais bien travailler à l'étranger. Pour améliorer mon anglais et changer de cadre de vie. Mais ça n'a pas l'air simple, à cause des législations nationales. A Vegas, par exemple, il faut que ton employeur prouve qu'il n'y avait pas d'américain disponible à ton poste sur le marché avant qu'ils puisse faire appel à tes services. Bref, c'est quasiment impossible, quoi.
- PokerNews : Vous m'avez dit que le moment le plus chargé de la semaine arrivait le vendredi soir. A Cadet, il y en a d'autres ?
- Samuel : Ce sont les tournois de l'après-midi qui attirent souvent le plus de monde, rapport au buy-in très 'doux' (30€ à 15h, du lundi au jeudi). La aussi, on peut dépasser les 100 joueurs. Donc, l'après-midi, c'est 'blindé'. Le vendredi soir aussi il y a énormément de monde, sans doute plus encore que l'après-midi, en comptant les tables de cash. Mais il y a aussi plus de croupiers sur le pont, alors ça va. Sinon, on remarque que les choses se calment un peu en fin de mois, les joueurs ont moins d'argent à dépenser. Et puis ça repart le mois suivant.
Les superstitions à la table
- PokerNews : Dernière question, les superstitions à la table. Vous en êtes témoin ?
- Siham : Bien sûr ! Bon, le plus classique, c'est le joueur qui s'habille toujours exactement de la même manière, qui garde son T-Shirt fétiche par exemple. Ou qui a un protège-cartes qui lui sert de gri-gri. Mais j'ai remarqué que les superstitions portaient aussi souvent sur les jetons ou les cartes. Il y a des types qui ne supportent pas qu'on touche à leurs cartes, qui veulent les défausser eux-même. Ou celui qui va absolument tenir à récupérer 'ses' jetons. Plutôt que de recaver en demandant des jetons neufs au floor, il va aller filer son argent au joueur qui l'a décavé pour que l'autre lui refile les jetons qu'il avait avant. C'est dingue...
- PokerNews : Un dernier mot sur Cadet pour conclure ?
- Samuel : C'est un cercle qui a une vraie identité, qui a su installer une ambiance. A la fois sérieuse et décontractée. Où on se sent bien, pour travailler comme pour jouer.
- Siham : Et puis c'est sans doute le plus beau Cercle de Jeux de la capitale. Le cadre est unique, on travaille vraiment dans des conditions idéales.
- PokerNews : Merci à vous ! Et maintenant, au boulot....
100.000€ Garantis au Cercle Cadet, samedi 16 avril à 16h
Pour décrocher votre ticket pour ce tournoi-Event (700€), le Cercle organise encore deux satellites spéciaux le lundi 11 avril à 21h (80€ : 10 Tickets garantis) et le vendredi 15 avril à 21h (100€ : 15 Tickets garantis).
Pour plus de renseignements
Cercle Cadet
14, rue Cadet 75009 Paris
Métro Cadet (ligne 7 du Métro)
Site du Cercle Cadet garantis).