Stratégie poker : Les "leaks" à la river chez les joueurs réguliers
Cet article est le quatrième d'une série consacrée à l'analyse des points faibles ("leaks") présents dans le jeu adverse, ayant pour but d'en tirer avantage. Après avoir abordé, le jeu préflop, au flop puis à la turn, nous passons aujourd'hui à l'analyse de la river. Les statistiques relatives au showdown seront abordées.
Si vous n'avez lu les précédentes parties, il est fortement recommandé de la faire afin de tirer le maximum de cet article qui s'appuie sur les analyses faites auparavant. Si vous souhaitez en apprendre plus sur les statistiques abordées ici, elles sont expliquées dans d'autres articles dédiés aux trackers et HUD.
Comme pour les parties précédentes, nous ne parlons pas des fish. Cette série se concentre sur les joueurs réguliers et de leurs principaux leaks, rarement aisés à déceler. Notre objectif étant d'aboutir à une série de notes utilisables en cours de session.
Les chiffres données font référence du no limit Hold'en en cash game 6max avec des stacks de 100 big blinds environ.
Le continuation bet river ou 3-barrel
Un continuation bet (c-bet) river ne peut être fait qu'à condition qu'il y ait d'abord eu un c-bet au flop et à la turn, qu'ils aient été payés et que l'on ait à nouveau l'opportunité de miser river. Cela implique que pour avoir des chiffres fiables quant aux c-bet river, il faut disposer d'échantillons importants. Cela dépend aussi des tendances d'un donné joueur à c-bet le flop et la turn. Quelqu'un avec un pourcentage de c-bet flop moyen (65%), sur un échantillon de 15.000 mains, a environ 50 opportunités de c-bet river.
Il faut bien réaliser que le c-bet river est dépendant des actions sur les streets précédentes. Dès lors, nous ne pouvons pas analyser le c-bet river sans nous pencher sur les c-bets flop et turn. Quand le pourcentage de c-bet au flop est faible, les pourcentages de c-bet turn et river seront relativement élevés. Aussi, quand un joueur a un taux de c-bet de 50% au flop, ses pourcentages de c-bet turn et river seront supérieurs. Il y a bien quelques (semi-)bluffs inclus mais cela représente assez bien la range de c-bet.
Un joueur avec faible taux de c-bet au flop, à la turn et à la river est quelqu'un de passif, qui ne mise que ses meilleures mains. Il est probable que ce joueur manque des occasions de valoriser certaines de ses mains. A l'inverse un joueur avec un pourcentage de c-bet élevé au flop (75%) qui c-bet aussi beaucoup les turns et rivers a une range avec beaucoup de bluffs et aussi quelques "thin value bets". De manière générale, si le taux de c-bet est élevé au flop, il est normal qu'il diminue turn et river. Des écarts trop grands indiquent des joueurs qui ont tendance à souvent c-bet une street pour abandonner à la suivante.
Ainsi, il est possible de tirer des conclusions du pourcentage de c-bet river à la condition de la mettre en rapport avec les chiffres au flop et à la turn. Il est également possible de filtrer dans sa base de données les occasions où un joueur aurait pu faire un c-bet flop, turn ou river mais ne l'a pas fait. Comme dans les précédents articles, savoir qui a tendance à 3-barrel (miser successivement le flop, la turn et la river) ou pas, sur quels boards, avec quelles mains vaut une prise de note.
Enfin, ces chiffres doivent être en relation avec les statistiques préflop. Un joueur 15/12 (VPIP/PFR) aura logiquement des pourcentages de c-bet plus élevés qu'un joueur 28/24. En moyenne, le taux de c-bet river est de 54%, mais ce chiffre n'a pas grand sens s'il est pris isolément.
Les statistiques relatives au showdown : WtSD et W$SD
L'on ne peut parler de la river sans aborder le showdown, c'est-à-dire le moment où les joueurs retournent leurs cartes pour savoir qui a la meilleure main et gagne le pot.
Went to Showdown (WtSD)
Ce chiffre indique le pourcentage de fois où un joueur qui a vu le flop va jusqu'au showdown. Seul, ce chiffre a peu de valeur car un taux faible ou élevé peut avoir différentes causes. Un WtSD moyen est de 26.5%, l'idéal étant compris entre 24 et 28%. Inférieur à 24 ou supérieur à 29, cela dénote un problème.
Un pourcentage de WtSD faible
Pour comprendre les dessous d'un faible WtSD, observons les quatre HUD ci-dessous. Ce sont ceux de quatre joueurs différents. Certaines stats ont été floutées. Celles visibles sont VPIP, PFR, AF (Facteur d'agression et AFq (Fréquence d'agression) sur la première ligne. La seconde est inutile ici. Sur la troisième, nous trouvons le "% de c-bet flop" (cb), le"% de fold face à un c-bet" et le "% de c-bet turn" (t c). La quatrième ligne indique le taux de relance de cbet, les "check raise", le "Went to showdown" et le "Won $ at showdown" (W$SD).
Tous ces joueurs ont un WtSD faible, signe d'une forte agression qui permet de gagner de nombreux pots sans avoir à aller jusqu'au showdown. C'est très clair pour le joueur 1 avec un WtSD très faible de 20%. Cela est dû à son taux de c-bet très élevé, sa fréquence d'agression post-flop élevée et sa tendance à souvent relancer les c-bets.
Ce type de joueurs est assez simple à contrer, en s'appuyant uniquement sur les stats du HUD. D'abord, il sera possible de le floater assez souvent. Lorsqu'il relancera nos c-bets, il n'aura que peu de crédit et, lorsque nous ferons un c-bet contre ce joueur, ce sera pour valoriser notre main. Quand il va jusqu'au showdown, il perd plus souvent qu'il ne gagne comme l'indique son W$SD de 46%. Il est très intéressant de savoir avec quelle range ce type de joueur mise/relance le flop et continue à la turn.
Le joueur 2 est davantage dans la moyenne, mais a aussi un faible pourcentage de WtSD. Il est intéressant de noter l'écart entre son taux de relance de c-bet et son taux de check-raise : cela indique qu'il a tendance relancer les c-bets quand il est en position. Pour en savoir plus, il faudra étudier les historiques de mains. De plus, si son taux de c-bet au flop est moyen, il est élevé sur la turn. Son facteur d'agression élevé le conduit à avoir un WtSD faible.
Le joueur 3 se distingue par l'écart important entre son VPIP et son PFR : il a tendance à call préflop, du moins, plus que la moyenne des joueurs réguliers. Il n'est pas spécialement agressif et est même un peu passif quand il s'agit de de relancer les c-bets et de check-raise. Il passe assez peu face à un c-bet flop, ce qui peut laisser penser qu'il aura tendance à plus passer turn et river, sans quoi il lui serait difficile d'avoir un WtSD si faible. Cela d'autant plus que son taux de c-bet flop n'est pas anormalement élevé, ce qui implique qu'il a tendance à passer face aux autres.
Le joueur 4 est un peu différent car sa sélection de mains préflop est plus serrée, ce qui résulte en un WtSD plus faible. Voyant peu de flops, il obtient davantage de respect. Son taux de relance de c-bets reste assez élevé, ce qui le mène à voir moins de showdowns. Son faible WtSD et sa sélection de mains serrées préflop indiquent qu'il est peut-être plus facile à bluffer.
Un pourcentage de WtSD élevé
Un WtSD élevé est bien plus fréquent, y compris chez les joueurs réguliers. Il est préférable de jouer contre ce type de joueurs, car leur fort WtSD est signe qu'ils sont souvent plus passifs. Dans les exemples de HUD ci-dessous, nous avons laissé les stats d'agression préflop.
Le seul dénominateur commun entre ces joueurs est leur pourcentage de WtSD élevé. Le Joueur 1 est très agressif préflop. Fort pourcentage de 3bet, de steal et de 4-bet. Parce qu'il est si agressif préflop, il c-bet moins le flop. C'est logique, puisqu'il aura une range de mains large quand il est payé. C'est aussi la principale cause de son fort taux de WtSD. De plus, il n'est pas si agressif postflop, avec de faibles AF et AFq. Quand il va jusqu'au showdown, il gagne 51% du temps. Son gros pourcentage de WtSD indique une tendance à payer, comme le montre aussi son faible pourcentage de fold face à un c-bet.
Le joueur 2 est aussi agressif preflop. Il ouvre beaucoup de mains et 3-bet assez souvent. Il aime aussi suivre et ne passe pas beaucoup face à un 3-bet. Cela indique des ranges plutôt larges pour jouer des pots 3-bet préflop. Le plus frappant est son fort taux de c-bet flop et turn. Cela laisse interrogatif quant à ce que ce chiffre peut être river. De l'autre coté, il passe peu face à un c-bet (43%) et a un W$SD faible. C'est un leak évident. Contre ce type de joueurs, il est préférable de bien valoriser et de ne pas bluffer : il suit beaucoup et passe peu post-flop.
Le joueur 3, comparé aux joueurs 1 et 2, a une autre philosophie du jeu préflop. Il est plus serré préflop. Ce qui explique son faible taux de fold face à un 3-bet et son fort pourcentage de 4-bet. Son agressivité est assez peu élevée pour un joueur avec des ranges aussi fortes au flop. Ce n'est pas un candidat idéal pour bluffer. Il serait intéressant de regarder de plus près ses pourcentages de fold face à un c-bet turn et river.
Le joueur 4 est lui aussi très serré préflop. On remarque qu'il mise peu sur la turn et passe très peu face aux c-bets. De plus, son W$SD est faible. Tout cela explique son porcenatge de WtSD.
Même les joueurs shortstacks (qui jouent avec 50 big blinds ou moins) ont presque toujours un WtSD élev. Cela s'explique par le fait qu'ils sont plus facilement "pot committed".
Won $ at Showdown (W$SD)
Le W$SD (Won $ at Showdown) indique le pourcentage de fois où un joueur gagne lorsqu'il est au showdown. Cette statistique est étroitement liée au WtSD.
Un W$SD moyen est autour de 50%. Tous les joueurs réguliers de ma base de données affichent un W$SD compris entre 40% et 60%. L'idéal étant compris entre 50 et 55%. Un W$SD faible indique soit que vous suivez trop souvent jusqu'à la river, ou que vous allez au showdown avec des mains trop faibles quand vous avez l'initiative. Le HUD ci-dessous en est un bon exemple.
Ce joueur est très agressif préflop, fait beaucoup de c-bets et relance souvent en position. Logiquement, son WtSD est peu élevé. La conséquence est que, quand il se retrouve au showdown, c'est souvent avec une range assez large (et donc plutôt faible).
Un W$SD élevé est souvent le résultat d'une fréquence de calls pas assez élevée river, qui implique une tendance à se faire bluffer trop souvent. Un fort W$SD peut aussi être associé à un fort WtSD, parce que cela ne signifie pas que le joueur ne valorise pas assez.
D'autres chiffres à observer
Won $ When saw flop (W$SF)
Cette statistique indique la fréquence à laquelle vous gagnez quand vous avez vu le flop. Ce n'est donc pas une statistique ayant trait au showdown mais elle est instructive quant à l'agressivité post-flop – ou son absence.
La moyenne est légèrement supérieure à 40%, la plupart des joueurs se situant entre 41 et 46. Les joueurs avec de gros pourcentages sont ceux qui misent et relancent agressivement et ont tendance à moins passer face à l'agressivité des autres joueurs. Quasiment tous les joueurs avec un W$SF très élevé répondent à cette description, avec de plus un W$SD légèrement moins élevé.
Les joueurs avec un faible W$SF sont moins agressifs, font moins de c-bets au flop ou à la turn. De plus, ils ont tendance à passer plus facilement face à l'agressivité adverse. Le résultat est un W$SD plus élevé, car ils attendent une main relativement plus forte pour aller au showdown.
Cette statistique est surtout le résultat de plusieurs autres stats et en donne un résumé rapide. Ce n'est pas une statistique qui vaut une prise de note, mais un moyen rapide de se faire une idée générale. Le W$SF est aussi affecté par les limites où vous jouez et les adversaires que vous y rencontrez. Sur les tables avec beaucoup de limps et de call préflop, ce chiffre aura tendance à baisser. Cela parce que l'on gagne moins souvent un pot en multiway qu'en heads-up et, parce que si plusieurs joueurs ont limpé avant vous, vous n'allez pas relancer votre big blinds aussi souvent.
Trouver des tells dans le betsizing
La taille des mises (betsizing) est une chose d'autant plus intéressante que l'on approche de la river. La plupart des joueurs ont intégré des tailles de mises et de relances standard préflop et au flop. La taille d'un continuation bet au flop est souvent la même. Sur la river, c'est différents. Les tailles des mises peuvent parfois servir de tell.
Le tell le plus répandu est de miser faiblement avec une main moyenne pour essayer de valoriser un peu. Un autre tell est le chiffre misé. Certains joueurs aiment utiliser un chiffre rond pour valoriser ou bluffer (25$). D'autres ont tendance à miser un chiffre qui montre moins de force pour être plus facilement payer (par exemple miser 69$ au lieu de 71$). Cela est vraiment spécifique à chaque joueur et analyser des historiques de mains pour déceler ce type de tells chez un joueur n'est jamais préjudiciable.
Télécharger BarrierePoker.fr :Packages Main Event WSOP APAC
Téléchargez BarrierePoker.fr et tentez de décrocher l'un des packages de 14.000€ mis en jeu pour disputer la première édition du Main Event desWorld Series of Poker Asia Pacific au Crown Casino de Melbourne (Australie) du 4 au 15 avril.