Histoire Poker : Bob Hooks, gambler itinérant sur les routes du Texas
Aux Etats-Unis, Bob Hooks a connu l'émergence du poker dans l'après-guerre, d'abord en tant que joueur itinérant sur les routes du Texas puis en tant que manager de la poker room au Binion’s Horseshoe lors de la première édition des World Series of Poker (WSOP) en 1972. Agé de 84 ans, on ne peut pas dire qu'il soit étranger au poker, pourtant son nom n'est pas resté dans l'histoire du poker.
Il vit aujourd'hui au Texas, dans une chambre du Best Western hotel, qu'il appelle son chez lui dans la ville de Texarkana. Où qu'il tourne son regard, Hooks ne manque pas de se remémorer une anecdote, qui sans lui serait tombée aux oubliettes de l'histoire du poker.
Dans ce article et ceux qui suivront, Bob Hooks nous racontera ses souvenirs, l'occasion de retrouver des légendes du poker, telles T.J. Cloutier, Doc Ramsey, Benny Binion ou encore Johnny Moss. Cette première partie s'intéresse aux premières années de Bob Hooks, en particulier quand il parcourait les routes du Texas pour trouver de l'action.
Bob Hooks, la vie d'un joueur
- Partie 1 : Histoire Poker : Bob Hooks, gambler itinérant sur les routes du Texas
- Partie 2 : Histoire Poker : Las Vegas, Johnny Moss et la rencontre avec Benny Binion
- Partie 3 : Histoire Poker : Amarillo Slim et sa victoire du Main Event WSOP 1972
- Partie 4 : Histoire Poker : Bob Hooks, 2d des WSOP 1975 et bookmaker à Dallas
- Partie 5 : Histoire Poker : Bob Hooks ou les souvenirs d'un joueur solitaire
Du poker de contrebande dans les bois
A 10,3 miles de son hôtel, se situe le véritable foyer de Hooks, à Edgewoo, Texas. C'est là qu'il est né le 18 août 1929, aîné des quatre enfants d'Alex et Inez Hook. Son père était entraîneur de baseball respecté à la Southern Methodist University (SMU), ayant joué en première base pour les Philadelphia Athletics et ayant détenu en son époque le record du lancer de poids de son état.
“Papa prenait son poids et le lancer tout le long du chemin de l'école, environ quatre kilomètres à pied – faisait de même en rentrant”, se souvient Hooks. “Il se donnait à fond”.
Comme beaucoup de jeunes hommes dans les petites villes, Hooks avait soif d'aventure. A Edgewood, l'aventure se trouvait dans l'alcool de contrebande et le poker. A 16 ans, Hooks fit la connaissance des deux.
“Je n'avais pas de voiture, pas de bicyclette, pas de spectacles, pas de télévision” raconte Hooks. “Je voyais ces types qui partaient dans les bois pour jouer aux cartes. Alors pour m'échapper de la maison, je sortais les voir jouer. Un de ces types m'avait permis de venir les voir jouer. C'est comme cela que j'ai débuté. Tous se saoulaient, mais moi jamais. Quand la partie était finie, j'avais tous les jetons parce qu'ils étaient ivres”.
Un jour, Hooks a gagné 16$. Cela peut sembler peu, mais en 1945, cette somme suffisait à changer la vie d'un garçon de 16 ans. Son père sur les routes, Hooks est rentré à la maison partager sa fortune avec sa famille.
“Je suis rentré à la maison, où il y avait mes frères Jerry et James, plus que jeunes que moi de deux et dix ans respectivement. Je suis rentré avec mes 16$. Vous auriez cru que j'en avais gagné 16.000$. Je suis rentré dans le salon et j'ai dit ‘Suivez moi dans la chambre’. J'ai jeté mes 16$ sur le lit et leur ai dit de prendre ce qu'ils voulaient. Jerry n'avait que 6 ans et n'a rien eu. Mais James, qui a fini par faire le banquier, a reçu 3$. Pour moi ces 16$ représentaient tout l'argent du monde”.
Six ans plus tard, Mary, la petite sœur de Hooks, naissait. A cette époque, Bob avait suivi les traces de son père et avait reçu une bourse pour intégrer l'équipe de football de SMU. C'est à SMU que Hooks a rencontré Kenny Smith, qui devint par la suite un joueur d'échecs réputé et l'un des premiers personnages marquant du poker : à chaque fois qu'il gagnait un pot, il ôtait son haut de forme, qu'il prétendait venir du Ford Theater, le jour où Lincoln se fit tirer dessus et lançait : ' Quel Joueur !'. Ensemble, ils ont partagé une amitié qui a duré la vie entière, dont beaucoup de temps passé aux tables de poker.
Une main mémorable les opposa au AmVets, le club de poker que Hooks ouvrit à Dallas. Selon la légende, Hooks a limpé, Smith fit une grosse relance. Hooks, qui avait les Rois, a 3-bet all in et Smith passa plus de trois minutes à réfléchir. Hooks n'en pouvant plus, prit les cartes de Smith et en découvrant deux As, mis lui même les jetons de Smith dans le pot.
“C'est histoire vraie” se souvient Hooks en riant. “Il n'y avait pas décision et il était en train de m'énerver. Il avait les nuts, tout le monde le savait et il était face à moi. C'est ainsi que l'on se taquinait l'un l'autre”.
Après avoir reçu son diplôme à SMU, Hooks s'en retourna à Edgewood commencer une vie de père de famille et de joueur de poker, bien qu'il laissa son occupation de côté. “Dans une si petite ville, personne ne savait que j'avais joué étant jeune” explique Hooks. “Un joueur de poker était alors un peu comme un contrebandier”.
Sur les routes avec Doc Ramsey et Johnny Moss
Hooks s'est marié à Cynthia Gready en décembre 1952, ensemble ils eurent quatre enfants — Bobby, Larry, Catherine et Ronnie. Agé d'un peu plus de 20 ans, Hooks obtient une voiture, qu'il mit à bon usage, devenant un joueur parcourant les routes du Texas. Avec le temps, il s'est développé une réputation de joueurs solide et cela bien avant que certains des meilleurs joueurs comme Doc Ramsey ne le remrquent.
A l'époque, le 'champion du poker' local était surnommé “Boss gambler” et c'est avec le plus grand respect que Hooks utilise le terme de “Boss gambler” à propos de Ramsey.
“Hooks, quel âge as-tu?” demanda Ramsey lorsque tous deux se rencontrèrent pour la première fois dans la ville de Tyler.
“29” répondit Hooks effronté.
“29” répéta Ramsey alors âgé de 65 ans. “J'aimerais avoir ton âge”
“Bien,” rétorqua Hooks, “J'aimerais avoir votre argent”.
Une amitié sans faille venait de naître et c'est ainsi que Ramsey a commencé à stacker Hooks dans ses jeunes années. Ramsey a quitté ce monde depuis longtemps, mais Hooks garde un souvenir impérissable de son ami : “Où que vous alliez, il était au top”.
Les pérégrinations de Hooks l'ont mené de Dallas à Houston, en passant par Long View, sans compter ses sorties en dehors de l'état du Texas. “Les kilométres semblaient sans fin, mas c'était le prix à payer pour trouver de l'action. Aujourd'hui, on trouve une partie par quartier” relate Hooks.
Tous les lundis soirs, Hooks allait jouer à Waco. C'est la qu'il a rencontréJohnny Moss, membre du Poker Hall of Fame et détenteur de neuf bracelets WSOP dont trois gagnés dans le Main Event. Moss fut par la suite connu sous le pseudo de “Grand Old Man of Poker”.
“Il était mon héros. Le meilleur joueur à la ronde” raconte Hooks. “J'écoutais tout ce qu'il disait. Il était malvenu dans certains endroits car il était trop bon. Mais on ne pouvait pas l'éviter car tout le monde voulait jouer contre Johnny Moss”.
“Il m'a pris en amitié. Toutes les semaines, je l'emmenais à Waco. On swappait 10%. Le temps a passé et il a voulu swapper 25%. Je devine que mon jeu s'était amélioré. Bientôt, tout le monde m'appelait 'Johnny Moss’ boy'”.
Après dix ans sur les routes du Texas, Hooks et un associé ouvrirent le fameux AmVets Post No. 4 au 308 ½ South Irving Street à Dallas en 1969. C'était illégal mais en recourant à l'astuce des AmVets [anciens combattants américains], le rake était justifié (environ 5-10% du pot) pour couvrir les dépenses du club. Hooks a tenu le club avec succès pendant un an, puis l'a revendu à Byron “Cowboy” Wolford avant de partir vers l'Ouest.
La seconde partie reprendra à l'époque où Bob Hooks a quitté le Texas pour aller à Las Vegas.
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