Jouer en début de parole au Omaha Hi-Lo avec Darryl Fish
En seulement quatre ans, Darryl Fish a cumulé plus de 1,4 millions de dollars de gains en tournois de poker live et online. Fish qui souhaite à présent concentrer ses efforts essentiellement sur le circuit live est déterminé à faire de grands WSOP 2011. Le joueur a d’ailleurs déjà cumulé deux places payées dans les events $1,500 No-Limit Hold’em Triple Chance et $1,000 No-Limit Hold’em. Fish est non seulement un spécialiste du No-limit Hold’em mais également très versé dans toutes les variantes d’Omaha. Pour Pokernews, il aborde la stratégie du jeu préflop lorsque l’on se situe en début de parole en Omaha hi-lo split eight-or-better.
Pokernews: Quelle gamme de main (range) doit on jouer en début de parole ? Quels sont les critères qui font que l’on va payer (limp) ou relancer ?
Darryl: Tout va dépendre en fait de votre habilitée à jouer post-flop. Beaucoup de joueurs ne rentrent qu’avec des mains qui vont leur permettre de jouer pour le « low » et sans avoir la moindre possibilité de remporter le « high », ce qui est une erreur fondamentale qui coûte beaucoup d’argent sur le long terme. Les joueurs vont souvent considérer à tort qu’un tirage « low » max, c’est la panacée, les « nuts » absolus. En réalité, si vous disposez seulement d’un tirage « low », vous serez condamné la plupart du temps à perdre un gros pot parce que d’une part, vous ne compléterez pas la plupart du temps votre tirage et d’autre part, le pot risque d’être partagé entre plusieurs joueurs, et dans ce cas, vous ne récupèrerez pas la totalité de votre investissement. Il faudra donc éviter de jouer des mains de « low » présentant des cartes mal connectées et surtout avoir la capacité de se coucher post-flop sur un tirage ou un « low » piège avec lequel on sera souvent dominé par nos adversaires. Des mains comme A-3-6-7 peuvent par exemple engendrer beaucoup de problèmes lorsqu’elles sont jouées en début de parole.
To Scoop or not to scoop…
Il est préférable de jouer des mains assorties contenant un As, comme A♠-2♠-K♥-4♥ par exemple, qui vont permettre de remporter à la fois le « high » et le « low » pour récolter l’intégralité du pot (scoop). Toutes les mains qui contiennent au moins trois des cartes suivantes, A, 2, 3, 4, 5, vont permettre de faire une « wheel » (A-2-3-4-5) et d’avoir la plus forte main pour le « low ». J’appelle A, 2, 3, 4, 5 des cartes « premières ». Avoir trois cartes « premières » avec un 8, un 9 ou un 10 compromet sensiblement vos chances de faire une main forte. Ensuite, lorsque vous avez décidé de jouer un coup, relancer ou effectuer un « limp » va dépendre de la force de votre main de départ, de la taille de votre tapis, et de votre plan sur le flop. N’oubliez pas qu’une main comme A♠A♥2♠3♥, c’est le must.
HU ou multi-way pot ?
Une main comme A-K-2-6 se comportera très bien dans un pot relancé car en vous retrouvant en tête à tête avec un opposant, vous aurez A-K vous le » « high » et A-2 pour le « low ». Avec une main comme A-2-3-6, il est préférable de jouer un « multi-way » pot, c'est-à-dire, de se retrouver contre plusieurs adversaires puisque vous ne pourrez espérer gagner que la moitié du pot. Il faut bien anticiper la manière dont votre main de départ va se connecter au « board » et bien vous figurer sur quel type de « board » vous allez pouvoir investir de l’argent. Il est surtout primordial de savoir avec quelle gamme de main il est important de provoquer le tête à tête et avec qu’il type de main il est plus approprié de jouer des « multi-way pot ». Le concept de range de mains prend tout son sens post-flop, puisque c’est là où se définit la force des mains.
Pokernews: As tu un exemple concret qui permette de bien illustrer les prises de décision dans le jeu pré-flop en début de parole ?
Darryl: Il me vient à l’esprit une main disputée par mon ami Steven Burkholder. Il avait A-2-3-6 assortis, les blindes étaient à 1.000/2.000, il avait un tapis de 20,000 et était en position Under the gun. Lorsqu’il m’a parlé de cette main, mon premier instinct m’aurait dicter de « limp » avec ce genre de main de façon à se retrouver contre plusieurs adversaires. En tête à tête, cette main ne vaut pas vraiment le coup d’être jouée.
Contrairement au hold’em où l’agression est la clé, vous trouverez beaucoup de « spots » où il est préférable de « limp » pour encourager les autres joueurs à vous suivre. Steven a donc relancé et s’est fait 3bet par un de ses opposants . Non seulement il s’est fait isoler en tête à tête avec une main dominée, mais s’est vu également demander d’investir 6,000$ préflop, ce qui est une somme considérable par rapport à la taille initiale de son tapis, pour aller voir le flop.
Les vertus du limp
Dans un cas similaire, un joueur de Hold’Em va se dire: “a ce stade, j’ai déjà trop investi d’argent pré-flop pour me coucher, autant sur relancer. » Steven a donc préféré effectuer un 4bet qui l’a impliqué totalement dans la main. En Omaha hi-lo, il est préférable d’aller voir beaucoup de flops pour le moins cher possible et espérer que beaucoup de joueurs se mettent à miser lorsque vous aurez connecté au flop. Alors qu’au hold’em il est souvent préférable de voir les 5 cartes du board, en Omaha hi – lo, étant donné que vous passerez à côté de beaucoup de flops, il est plus sage de simplement jeter ses mains et d’attendre le meilleur spot possible.
Donc, Steven a 4bet à 8.000, a été payé, et un flop J – 9 – 3 monocolore est tombé. Il s’est retrouvé dans un coup lui donnant une paire basse et un tirage couleur et low « backdoor ». Sa main est loin d’être sexy et si son adversaire a une paire d’As, il encourt de sérieux ennuis. Steven a procédé à un « check » sur le flop, son adversaire à misé 2,000 et il a payé. Un 4 est tombé sur le turn, lui ouvrant un tirage low. Steven est parti à tapis et a été payé. Une carte haute est tombée sur la river, donnant à son adversaire une double paire max et Steven a été éliminé du tournoi.
Cette main aurait eu un tout autre dénouement si Steven avait « limp » en début de parole avec sa main de départ spéculative. Il aurait joué un multi-way pot et aurait pu sans souci payer une relance pré-flop. Si Steven avait touché un bon flop, il aurait pu faire une véritable razia de jetons contre plusieurs adversaires. En Omaha, la passivité a du bon et ce concept est souvent mal compris par les joueurs de hold’em qui misent tout sur l’agressivité. Mon discours peut certes passer pour une approche faible et passive du jeu mais il s’agit en fait de la meilleure façon de joueur en début de parole. Tout ce qui compte, c’est de préserver son tapis.
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