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La reshove equity

Kipik poker

Dans la série « les moves basés sur la fold equity », il en est un qui occupe une place royale : le reshove.

Le scénario est simple : un joueur en fin de parole relance et, en réponse, on le surelance à tapis. L’idée : le joueur qui relance en fin de parole peut le faire avec une sélection de mains (range) très large, beaucoup plus large que celle avec laquelle il est prêt à payer notre tapis. Il nous laisse donc une fold equity (FE) importante, qu’on va à notre tour exploiter en faisant tapis avec un range assez large.

Reshove Equity : conditions de base

Il faut qu’on ait réellement de la FE. Si le relanceur initial est un bon joueur qui commençait le coup avec 16 blindes (bb), il est illusoire de penser qu’il couchera en réponse à notre surelance.

De même si notre tapis est trop faible. Il faut que notre tapis soit d’au moins un tiers de celui de notre adversaire pour représenter une menace réelle. Et, idéalement, plutôt même la moitié.

Enfin, il faut aussi que l’adversaire sache coucher une main : sur des tournois à très faible buy-in, par exemple, il existe des adversaires sur lesquels ce move ne marchera jamais car ils sont incapables de coucher leur main. Ou de coucher suffisamment de mains (ce qui revient au même, on joue alors quasiment sans FE et seule compte la valeur de notre main).

Le principe est le même que pour les autres moves basés sur la FE : on gagne chaque fois que l’adversaire se couche et parfois quand il ne se couche pas. Si la somme de ces deux gains est supérieure à ce qu’on perd quand on est payé et qu’on ne « chatte » pas, alors le reshove est envisageable.

Prenons un exemple de base pour illustrer

Le joueur à droite du Bouton (Cutoff, CO) relance à 3bb et, au Bouton (BU), nous envisageons de reshove avec un tapis de 18b. Pour la forme, disons que les ante représentent 1/4 de petite blinde (ex : 100/200 ante 25) pour un total qu’on arrondira à 2bb.

Chaque fois que notre adversaire se couche, nous gagnons ses 3bb, les 1.5bb des Blindes et les 2bb d’ante. Soit 6.5bb

S’il paie et qu’on gagne, on ramasse 18bb (notre tapis) plus 3.5bb de blindes et ante. Soit 21.5bb.

S’il paie et gagne, on perd 18bb (notre tapis).

La formule pour déterminer le bénéfice (ou la perte) va intégrer ces trois scénarios et est en gros la même que lors des précédentes chroniques sur la FE :
X*6.5 + (1-X)*(W%*21.5-(1-W%)*18)
X étant la fold equity et W% l’équité de notre main contre la range de notre adversaire, autrement dit nos chances de gagner le coup.

Déterminer si le reshove est intéressant ou non revient donc à déterminer notre fold equity et la range avec laquelle on est susceptible d’être payé. Rien de nouveau jusque là…

Cas n°1 : le relanceur initial est actif

et peut relancer très généreusement au CO. Disons un bon 27-28% du temps. Soit un range : {22+,A2s+,K6s+,Q8s+,J8s+,T8s+,98s,87s,A7o+,K9o+,QTo+,JTo}. Pas non plus un maniaque, juste un joueur un peu opportuniste. Si on le surelance, il ne va bien sûr pas payer avec toutes ces mains, la plupart seront couchées.

Avec quoi peut-il nous payer ? Un range décent, qui tient déjà compte du fait qu’on puisse être en carnaval, pourrait être quelque chose comme {88+,ATs+,KQs,AQo+}. Soit 6.5% des mains.

En résumé, il relance 27.5% de ses mains. Et ne va payer qu’avec le top 6.5%. Dit autrement, il va donc coucher près de trois fois sur quatre et payer seulement 6.5/27.5=23.6% du temps. Notre FE est donc de 76.3% (arrondissons à 24% et 76%).
Notre équation devient : 0.76*6.5+0.24*(W%*21.5-(1-W%)*18) = 4.94+0.24*(W%*21.5-(1-W%)*18)

Pour que le reshove soit correct, il suffit donc que la différence entre ce qu’on gagne quand on est payé et ce qu’on perd soit inférieure à 4.94. On peut résoudre cette équation assez facilement et déterminer une valeur de W% suffisante pour dégager un bénéfice. Je vous laisse vous « amuser » et vais me contenter d’annoncer le résultat : même si notre main avait une équité nulle (elle ne gagne JAMAIS), le résultat serait tout de même positif : 4.94+0.24*(0*21.5-1*18)= 4.94-0.24*18=4.94-4.32=0.62

Dans une telle situation, on pourrait donc reshove sans même regarder notre main et dégager un bénéfice (aucune main n’a une équité inférieure à 11,8% même contre AA).

La raison tient ici dans la trop grande FE que nous laisse notre adversaire : il relance un peu trop et se couche beaucoup trop. Je ne tiens absolument pas à ce que vous pensiez qu’on puisse reshove en aveugle et s’en sortir gagnant à long terme.

Néanmoins, ce genre de profil existe, de joueurs qui volent un peu trop facilement mais sont incapables ensuite de s’ajuster quand on les agresse.

Cas n°2 : vilain nous paie un peu plus largement.

Il relance toujours autant mais paie un peu plus large, disons 11.6% du temps (soit avec un range : {66+,A9s+,KTs+,QTs+,ATo+,KQo}).

Cette fois-ci, notre FE n’est plus que de 1-(11.6/27.5)=57%.

Et notre équation devient : 0.57*6.5+0.43*(W%*21.5-(1-W%)*18)=3.7+0.43*(W%*21.5-(1-W%)*18). On trouve W%=24% pour que notre reshove soit au moins positif.

Dans ce cas, il faut, et il suffit, que notre main gagne 24% du temps contre son range de call {66+,A9s+,KTs+,QTs+,ATo+,KQo} pour ne pas perdre d’argent. Ici aussi, n’importe quelle main fera l’affaire, même 72 a une équité de 26.5% contre ce range.

Pour autant, faut-il le faire avec 72 ? Le bénéfice est certes faible, même pas 1/2 bb, mais, mathématiquement, ça ne serait pas incorrect… si on ne tenaitpas compte du fait qu’il reste encore deux joueurs à parler derrière nous (SB et BB) qui sont susceptibles de trouver une main assez forte pour nous payer. Le risque encouru est suffisamment grand pour ne pas justifier de reshove avec 72 si la récompense espérée est un bénéfice de 0.5bb quand les blindes se couchent. Il va donc falloir se montrer plus exigeants et se contenter de mains offrant une meilleure équité.

Cas n°3 : l’écart se resserre

Le joueur au CO est un peu plus serré mais n’a pas peur de prendre des risques. Disons qu’il relance 20% du temps {22+,A5s+,K9s+,QTs+,JTs,T9s,A9o+,KTo+,QTo+}. Et nous paiera avec les meilleures 11% des mains {77+,A9s+,KTs+,QTs+,ATo+,KQo}. Notre FE n’est plus que de 45%. Ce qui nécessite une équité de 33% pour ne pas perdre d’argent quand on reshove. Beaucoup de mains font encore l’affaire, notamment les mains assorties, mais énormément de non assorties, comme K9 ou Q10 sont déjà trop faibles pour justifier le risque. Sans compter, bien sûr, qu’il faut toujours prendre en compte la possibilité que les blindes se réveillent avec une main forte.

Cas n°4 : contre un joueur serré

Notre adversaire ne relance probablement pas plus de 16% du temps {22+,A7s+,KTs+,QTs+,JTs,ATo+,KJo+,QJo} et nous paiera avec le top 10% {77+,ATs+,KQs,ATo+,KQo}. Notre FE n’est plus que de 37%. Et notre main a besoin de 36% d’équité pour dégager un bénéfice.

36% n’est pas une équité que beaucoup de mains peuvent justifier contre un range de 10% : QJ fait l’affaire, mais pas K10 ; A9 et A10 sont corrects alors que A8 et A9 ne le sont même plus. On atteint ici le cas de figure où notre reshove sera plus pour value (la valeur brute de notre main) que pour le bluff (la fold equity).

On résume

Déterminer sa reshove equity n’est pas très compliqué. Le calcul est toujours le même et reste basique (ce qu’on gagne quand vilain fold + ce qu’on gagne quand on remporte la confrontation – ce que nous coûte de perdre la main, généralement notre tapis). Toute la « difficulté » réside dans l’estimation la plus correcte possible de notre FE, autrement dit du rapport entre le range avec lequel il paie notre tapis et celui avec lequel il a relancé.

La meilleure façon de s'entraîner à ce genre « logique » est encore de se servir d’un tableur : créez une colonne FE, une autre W% (l’équité de notre main contre le range supposé) et servez-vous en pour calculer dans une troisième colonne la rentabilité (l’équation). Faites varier les paramètres (FE, Win%, profondeur de tapis) et, à l’aide de Pokerstove, cherchez quelles mains remplissent les critères de rentabilité.
C’est certes un peu long mais vous allez voir que des « constantes » apparaissent. Que la relation FE-Win% est primordiale. Que quelques mains s’en sortent mieux que d’autres quel que soit le cas de figure (et pas seulement les premiums). Mais aussi, et surtout, que certains profils adverses sont clairement de bonnes cibles pour un reshove.

En règle générale, on va rechercher soit un joueur qui paie trop large si on dispose d’une main légitime, soit un joueur qui relance trop et ne paie pas assez notre surelance. Il ne s’agit pas, d’ailleurs, forcément d’un joueur loose : un joueur assez serré mais trop timide dans ses calls fera aussi une excellente cible.

Dans tous les cas, ce qu’on cherche est un rapport entre les ranges de relance et de call qui laisse le plus de FE possible. Un joueur très loose mais pas idiot, un joueur serré mais peureux… peu importe, tant qu’il nous donne une bonne fold equity. Et plus cette FE sera forte, moins notre main (comme toujours) aura d’importance.

Attention toutefois à ne pas surestimer notre FE. Ni à sous-estimer le risque qu’un autre joueur, derrière nous, ne vienne nous cueillir avec une bonne main. Il n’est certes pas facile de payer une relance suivie d’un tapis, mais même si ce n’est qu’avec 4 ou 5% des meilleures mains, on se retrouvera alors à jouer une main dramatiquement dominée. Ce risque est amplement suffisant pour renoncer aux situations les plus marginales.

Plus le relanceur initial est en position tardive, meilleure sera votre situation. D’abord parce que ce joueur est susceptible de relancer avec un range plus large. Mais aussi car cela limite les risques qu’un troisième joueur vous prenne par surprise. Reshove de la BB sur un joueur au BU est plus facile, et donc rentable, que de le faire de la SB sur le CO… qui l’est encore plus que d’être au BU contre un joueur en milieu de parole.

Il y a énormément de jetons à gagner en maîtrisant cette problématique de reshove equity. Dans les exemples pris, chaque reshove non payé nous assure un bénéfice de 6.5bb pour un tapis de départ de 18. Gagner 1/3 de son tapis sans confrontation mérite largement de prendre quelques risques. D’autant que cela vous permet de passer d’un tapis pas assez profond pour voler les blinds à un stack qui le permet. Evidemment, cette « récompense » s’accompagne du risque d’être payé et, généralement, de sortir du tournoi. Avec, parfois, la bonne surprise d’être payé par une main inférieure (mais, dans ce cas, votre estimation de la FE était probablement incorrecte) ou d’améliorer assez notre main pour doubler notre tapis.

La seule contrainte est, bien évidemment, que la somme de ces différentes issues soit positive. Il faut un peu d’habitude, et autant d’essais infructueux, pour réussir à bien analyser la situation et décider de la validité du reshove, de sa rentabilité. Mais cela vient avec l’expérience et augmente considérablement vos chances de performer sur vos tournois.

Un peu de calcul, d’observation et de courage

En règle générale, les joueurs ne « reshovent » pas assez. En particulier sur des tournois à petit buy-in (et ceux qui le font le font souvent mal). La plupart « reshove pour value » et uniquement pour value (même, en fait, avec des mains comme A10 ou 77). Et je ne vais pas vous dire de commencer à reshove quelle que soit votre main. Mais essayez de vous intéresser plus à la situation et vous découvrirez très rapidement des situations où le joueur qui a relancé est susceptible de ne payer que très rarement votre tapis. Si votre main n’est pas une poubelle absolue (personne ne vous en voudra de préférer coucher J4), prenez votre courage à deux mains, faites-vous violence si nécessaire, mais prenez le risque qui s’impose dans cette situation favorable.

Ça ne se passera pas toujours bien. Mais, à terme, et mieux vous comprendrez la mécanique derrière le calcul, plus vous resterez longtemps dans la « zone 20bb » et plus vos résultats en tournois s’amélioreront. Les joueurs de golf ont le practice pour s’améliorer, les joueurs de poker ont leur tableur et Pokerstove. N’hésitez pas à en user et en abuser, ce temps consacré à « l’étude » se rentabilise très rapidement.
Bons shoves !

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