Stratégie avec Terrence Chan : bien aborder un championnat de poker en ligne
En 2009, Terrence Chan est devenu le premier joueur à remporter en une seule journée deux tournois du Spring Championship of Online Poker (SCOOP) sur Pokerstars.com. Pour ce faire, il avait décroché les variantes 'medium' et 'high' (530$ et 5.200$ respectivement) de l'Event #20, un tournoi de no-limit Hold'em disputé dans un format '6-max'. Chan nous éclaire aujourd'hui sur les stratégies à mettre en place lorsqu'on dispute un long championnat de poker en ligne.
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Se faire un programme à l'avance
- Lorsque tu te prépares à disputer un championnat entier comme le SCOOP, est-il important de se construire un programme à l'avance ?
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- Absolument. Et il faut que ce programme soit tentant. Par exemple, avant les derniers World Series of Poker, j'ai étudié attentivement le calendrier des tournois et leur ai attribué à chacun une note - de 0 à 5 - symbolisant l'envie que j'avais de les disputer. Il y a certains tournois dont je sais déjà à l'avance que je ne les disputerai pas. Quand ils se jouent dans une variante que je ne maîtrise pas bien, quand ils se trouvent en dehors de mon budget ou quand ils promettent d'être particulièrement rasoirs, je leur mets 1 ou 2. A l'inverse, quand je sais que je vais les disputer, je leur mets un 5
Cela dit, je sais qu'il est important d'être flexible. Il ya des matins où on se réveille avec une sorte de gueule de bois. Ca arrive par exemple quand on est allé loin dans un tournoi le soir précédent et qu'on a fait la bulle. Même si on est toujours tenté dans ces cas-là de se remettre rapidement en selle, demandez-vous quand même si vous êtes dans le bon état d'esprit pour jouer. Si vous êtes un bon professionnel qui sait parfaitement faire table rase du passé, alors pas de problème. mais soyez honnête avec vous-même et demandez-vous si vous êtes vraiment prêt à jouer 16h d'affilée.
Pour en revenir aux SCOOP, certains tournois peuvent être vraiment très longs.
La pire chose qui puisse arriver, c'est de jouer sept ou huit heures d'affilée parfaitement en ligne et puis de se dire d'un coup : "et m***e. J'en ai marre. Je vais faire tapis et ça passe ou ça casse." Ca nous est tous arrivé. Tout le monde a déjà eu cette attitude dans un tournoi à un moment ou à un autre mais c'est vraiment quelque chose à éviter. Dans ces cas-là, il aurait peut-être mieux valu éviter de s'inscrire dans le tournoi au départ.
Gestion de bankroll
- Comment déterminer quelle enveloppe budgétaire on peut consacrer à un championnat en ligne ?
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- Il y a deux facteurs primordiaux : la taille du field et votre 'edge' (NDLR : votre avantage par rapport au niveau moyen du field). La taille du field a une influence sur votre variance évidemment. On ne s'autorise pas les mêmes buy-ins en Sit&Go et dans un tournoi qui compte 3.000 joueurs. Si vous êtes un joueur professionnel sérieux, vous devez prendre ces éléments en compte pour déterminer à quels tournois vous pouvez participer. On trouve dans des livres comme Mathematics of Poker des tableaux très bien faits qui vous donnent le buy-in maximum que vous pouvez vous payer en fonction de votre bankroll, de votre retour sur investissement moyen (qui correspond en fait à votre 'edge') et de la taille du field.
Plus le temps passe, plus le niveau moyen des joueurs augmente et plus l'edge de chacun a tendance à diminuer par rapport au reste du field, donc ces calculs ont une importance de plus en plus cruciale pour tous ceux qui veulent éviter de finir 'broke'.
Et puis n'oubliez pas : si un tournoi vous fait très fortement envie mais qu'il est hors de vos moyens, il vous reste toujours la possibilité de vendre des parts de votre ticket, histoire de partager les risques à plusieurs.
Le 'staking' en question
- C'est vrai qu'il est de plus en plus courant d'avir recours au 'staking', tout spécialement au sein de la communauté des joueurs en ligne. Mais que penses-tu de cette nouvelle mode qui consiste à vendre des parts en 'packages', par exemple vendre une part de ses gains futurs sur la totalité d'un championnat comme les SCOOP ?
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- Je suis à fond pour. Pour peu que vous soyez un joueur régulier ayant montré ue constance dans ses résultats par le passé, ce peut être une situation +EV pour toutes les parties impliquées. Le joueur, qui n'a pas à financer lui-même la totalité de ses buy-ins, et ses financiers, qui peuvent espérer un retour sur investissement.
Il reste tout de même deux dangers auxquels il faut prendre garde : d'une part, ne vendez pas 90% de votre ticket sans quoi vous ne donnerez pas le meilleur de vous-même pour remporter le tournoi : d'autre part, je suis réservé sur les joueurs financés sur le long terme, ceux qui sont suivis par un même 'staker', tournoi après tournoi. Ces joueurs peuvent être tentés de privilégier la régularité de leurs revenus à la maximisation de leurs profits...
Rentabiliser les pauses
- En 2009, lorsque tu as remporté tes deux tournois SCOOP le même jour, t'était-tu inscrit au plus grand nombre de tournois possible ou pas ?
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- Pas du tout. Ces deux victoires devaient être respectivement les 4ème et 5ème tournois auxquels je m'inscrivais depuis le début des SCOOP. Et pour une raison bien simple : je m'adonnais surtout au cash game en ligne à cette époque. J'aimais bien aussi les tournois Live, le fait de découvrir de nouvelles personnes, de nouveaux lieux, mais je n'ai jamais été un très grand fan des tournois en ligne. Le fait de devoir rester assis 10h de suite derrière son ordinateur, sans pouvoir quitter la table... Comme je m'applique à moi-même les conseils que je prodigue, très souvent je me dis que je ne suis pas dans les meilleures dispositions d'eprit pour participer à tel ou tel tournoi en ligne et donc je m'abstiens. Il ne sert à rien de faire les choses si vous n'êtes pas à 100%.
- Et donc, comment as-tu fait pour ne pas craquer avant la fin de ces tournois, pour rester concentré jusqu'au bout ?
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- Je profitais à fond de chaque pause de cinq minutes. Je me mettais à mon balcon, m'étirais, respirais à pleins poumons, me balladais un petit peu. C'est important pour la circulation sanguine et, plus généralement, pour tous les gens qui, comme moi, ont des petits problèmes à rester concentrés d'un bout à l'autre d'un tournoi en ligne. Il faut prendre le poker pour ce qu'il est : une compétition de haut niveau. Quand une équipe de NBA est à la peine, l'entraineur demande un temps mort. Au poker, nous n'avons pas de temps mort mais des pauses programmées. Alors autant en profiter à fond pour se détendre et se reconcentrer.
L'intégralité du podcast (en anglais) avec Terrence Chan
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